mercredi 31 décembre 2008

Première classe, seconde classe

Première classe, première fois, dernière sans doute aussi. De retour d'un petit voyage dans les montagnes enneigées d'Auvergne, j'avais pris un billet bon marché en première classe.
Les plaines d'Auvergne
(Photo:emi)
Je me disais le grand fauteuil, de la place pour allonger mes grandes jambes, des gens calmes et élégants... Je n'avais pas prévu pourtant les visages tendus, les mines fatiguées, les regards blasés, trop de chauffage sans doute. Je ne savais pas non plus les attitudes hautaines, les yeux qui se détournent, personne pour m'aider avec mes paquets -précieux en plus, mes paquets!-, l'indifférence. Pire que ça, l'expression exaspérée par les bruits pourtant amusants d'un de mes paquets... Il y en a qui ne savent s'émerveiller de rien, qui n'ont jamais souri à un inconnu ou entamé une conversation avec un clochard, qui ne partagent rien et laissent ce qu'ils ont en eux -si peu, si peu- se pourrir de l'intérieur, sans jamais le faire fructifier par l'échange. A tous ceux là je souhaite bien du courage pour l'année 2009, parce que si l'argent est le nerf de la guerre, c'est bien connu il ne fait pas le bonheur, et par ces temps de crise il vaudrait mieux trouver une autre manière d'affirmation personnelle que l'apparence. Et sachez que la première classe pour moi, c'est fini!

mardi 23 décembre 2008

Ca ne s'invente pas!

Cadeau de Noël prédestiné. Clin d'oeil mais aussi bouffée de souvenirs, un peu de nostalgie sur papier. Une crêpe au sucre au Bettex face au Mont Blanc, le Mont d'Arbois le soir et ses chalets illuminés, un moine franciscain en sandales croisé sur la voie romaine de Notre Dame de la Gorge... A chaque page une anecdote, un paysage, un visage ou une ambiance. Et l'envie de refaire le chemin, non pas pour se replonger dans le passé, plus que jamais révolu, mais pour choisir cette fois de repartir du bon pied, sur les mêmes sentiers, mais autrement, avec d'autres compagnons de voyage à qui on ferait découvrir ces routes, et qui pourquoi pas suivront les traces de la petite Emilie...

mercredi 10 décembre 2008

Le jade et l'obsidienne

Alain Gerber, Le jade et l'obsidienne, 1981.

Ca parle du Mexique, des Aztèques, je prends! Petit retour en arrière à l'époque de mon adolescence, quand je recopiais des pages et des pages de livres sur les Aztèques et les Mayas, que je décalquais les photos de la pyramide de Palenque... J'avoue, j'ai pourtant eu du mal à "rentrer" dans ce livre. Le style peut-être, un peu compliqué, la narration sans doute, pas très claire -au début on peine à comprendre l'histoire -de quoi s'agit-il? où sommes nous? quand?-, à identifier le narrateur -qui parle?-. En réalité nous nous situons dans les dernières années de l'Empire Aztèque. Celui-ci arrive à la fin d'un cycle de 52 ans, et pour que le soleil renaisse il faut donc se prêter à un nombre astronomique de sacrifices humains. C'est une débauche de guerre fleurie et de sang qui coule, un massacre. Au milieu de ce désastre institutionnalisé, un jeune guerrier, Chimalpopoca, se glorifie de devenir un des meilleurs de sa caste, dévoué au Dieu Tezcatlipoca, "miroir fumant", le frère ennemi de Quetzalcoatl. Le père de Chimalpopoca est d'ailleurs au désespoir de voir que son fils s'oriente vers les armes plutôt que vers les livres. Même la belle Atototl dont il est amoureux se détourne de lui car elle rejette cette horrible cruauté du sacrifice humain et de la guerre. Mais un beau jour, lors d'une campagne contre un peuple ennemi, Chimalpopoca perd l'usage d'une main et doit donc prendre sa retraite de guerrier. Il s'oriente alors vers une carrière dans la justice et devient peu à peu l'un des conseillers favoris de l'empereur Moctezuma. Petit à petit, à la grande satisfaction de son père, il se plonge dans les livres et se détourne du Dieu Tezcatlipoca pour lui préférer le pacifisme de Quetzalcoatl. De plus, l'année qui commence est une année Un-Roseau et Chimalpopoca est certain que le Dieu, comme il l'avait annoncé, va revenir parmi les hommes. Il entame alors une croisade perdue d'avance contre les sacrifices humains, qui selon lui dissuadent Quetzalcoatl de revenir. Au palais personne ne le soutient, jusqu'au jour où Moctezuma en personne lui révèle un lourd secret: les sacrifices humains sont de toute façon inutiles, les Dieux sont morts et n'ont pas besoin de ces horribles offrandes, ils ne reviendront pas dans ce monde. En un instant tout s'écroule autour de Chimalpopoca, mais il ne peut se résigner à croire ce que lui affirme l'empereur. D'autant plus qu'à l'est, d'étranges personnages d'acier viennent d'arriver sur des temples flottants. Cette fois c'est sûr, ce sont les envoyés de Quetzalcoatl, il en est persuadé. Il lui faudra pourtant se rendre à l'évidence: ces guerriers de fer qui massacrent son peuple ne sont que des hommes, et les pires qu'il soit. L'Empire Aztèque s'effondre face aux conquérants espagnols. C'est la fin de son monde que contemple Chimalpopoca dans sa barque qui s'éloigne de la ville en flammes.

L'histoire, on la connaît tous. Le roman est parfaitements documenté, bien écrit. Peu à peu on pénètre dans ce monde inconnu jusqu'à ce qu'il nous devienne familier, juste au moment où les espagnols le détruisent. Belle tentative que de vouloir restituer la fin de l'Empire Aztèque vue de l'intérieur, à travers le regard désespéré et rempli d'effroi de l'un de ces plus fidèles sujets.


Quetzalcoatl et Tezcatlipoca

lundi 8 décembre 2008

Barbara Luna

Dans la pénombre d'une jonque chinoise sur la Seine, un vendredi soir de décembre. Des péniches passent de temps en temps en éblouissant par leurs lumières de fête, un peu agressive. A l'intérieur, les regards se croisent, on marche avec précaution, on s'observe. On se trouve une petite place sur le pont couvert, à l'abri des courants d'air froid qui transpercent les vitres. Ca tangue. Deux heures de retard, les gens s'entassent sur le petit bateau, une atmosphère d'attente impatiente s'installe. On commente, on s'interroge, nervosité, excitation. Soudain les musiciens se mettent en place. Et de l'autre bout du bateau elle s'avance, lentement, le regard baissé et la démarche sensuelle, concentrée, dans son monde. Applaudissements, premiers sourires. Sa voix sort de la pénombre, chaude, rauque, profonde. Quelle présence! Jeux de lumières. Les projecteurs qui offrent une lumière tamisée, les regards allumés d'admiration, et elle, irradiant de beauté. Et partout des éclats d'amour. La musique démarre, elle enchaîne les morceaux et le bonheur d'être là va crescendo. Elle danse, elle s'amuse, elle séduit. Un regard vers la salle qui croise le mien, un sourire, un instant d'éternité et de la chaleur voyageuse d'elle à moi. Elle transmet, elle rassure, elle éblouit. Elle était là ce soir plus présente que jamais. Elle m'a emmenée très loin à sa suite, un de ces voyages qu'on n'oublie pas.

Barbara Luna en concert à La Dame de Canton

(Photo:emi)

jeudi 4 décembre 2008

Entendu dans le métro

Deux jeunes adolescentes en grande discussion, une petite asiatique timide avec des lunettes et une pétillante brunette aux yeux verts:
"Inès elle se met à côté de moi pour copier, je le sais bien.
-Dans quels cours?
-En latin et en français, dans ces cours là elle veut toujours se mettre à côté de moi et pas dans les autres cours. Je le vois bien qu'elle copie...
-C'est pas juste...
-Pourtant moi je travaille, c'est pas si facile, et eux ils font que copier sur moi, ils font rien!
-C'est dégueulasse! Tu veux que je lui dise à Inès parce que je la connais bien?
-Non je veux pas.
-Comme tu veux!
-J'en ai marre... Si ça continue je vais me mettre toute seule pour les contrôles!
-T'as raison. Bon je vais te dire un truc parce que je t'aime beaucoup. Inès et les autres filles quand t'es pas là elles disent toujours des trucs sur toi, que t'auras jamais de petit copain, que t'es une intello, que t'es pas sympa, que t'es mal habillée...
-Je sais bien de toute façon, elles sont pas sympa, j'en ai marre...
-Bon je te laisse je descend là, on en reparle demain!"
Et la petite asiatique timide de se renfermer comme l'escargot dans sa coquille après ces confidences pas vraiment bien intentionnées et de reprendre un joli dessin qu'elle avait commencé sans doute plus tôt, un palais japonais. Ah, la cruauté des adolescents, la bêtise, et la difficulté d'être "la meilleure de la classe" et de ne pas avoir d'amis, l'intello de service qui tente quand même de s'intégrer. J'avais envie de lui parler à cette petite, de lui dire que ceux qui copient n'iraient jamais aussi loin qu'elle, que sa soi disant copine n'était pas la seule référence ni la vérité, qu'il fallait qu'elle se forge une carapace, que son dessin était très joli... J'y ai reconnu un peu de moi à son âge... Affirme toi petit oiseau, affirme tes rêves, sinon tu vas finir prof!

mardi 2 décembre 2008

La Lune et le Soleil

La Lune parce qu'elle s'appelle Barbara Luna. Le soleil parce qu'il est omniprésent en elle, dans ses mélodies, même si celles si sont souvent teintées de nostalgie. Le mal du pays, ce petit coin d'Argentine où elle a laissé un peu d'elle même, l'amour qui s'est enfui mais qu'on tente de retenir, les coups de la vie, mais toujours l'espoir de jours meilleurs. Sur scène elle brille comme une étoile, un feu follet, une étincelle d'energies positives. Dans la vie elle déborde de générosité, humaine. Elle partage avec son public, se donne et reçoit forcément, parce que l'échange est quelque chose qui la fait avancer, qui nous fait tous vibrer et grandir une fois la porte de la salle de spectacle franchie, qui nous poursuit après chaque concert. Moments magiques, hors du temps. Et sa voix rauque et chaude nous transporte au plus profond de nous mêmes, nous fait vivre des instants d'éternité.
Barbara Luna est en concert ce vendredi à la Guinguette Pirate à Paris (Metro Quai de la Gare) à 20h30. J'y serai... enfin!


(Ps pour ceux qui s'étonnent: Quoi?? Elle ne va pas au concert de Qhantati? et elle va à un autre concert??? Comment?!! Méditez sur cette célèbre question de François Hollande aux Guignols: "Qui va garder les gosses?" Vous me suivez?)

Echos

Revue de presse du concert de Qhantati à l'UNESCO. Ils y étaient!
"Je suis allée au concert de QHANTATI vendredi. Je me suis régalée.... J'ai moins aimé la première partie avec la chorale de Châtillon. Ils ont très bien chanté, mais ça reste classique. J'ai acheté le CD "Juntos". J'aime beaucoup." Agnès
"C'était vraiment bien et ce qu'ils font est vraiment très important. Ils restent en France le seul groupe à restituer autant de facettes de la musique bolivienne, surtout à rendre avec autant de maitrise la musique traditionnelle des communautées." Bruno
"El concierto de Quantati me gusto. Y como siempre hay un pero, te transmito el mio. Pienso que la sala de la UNESCO no es la mejor adaptada para hacer musica. El sonido no me parecio nada bueno. Ademas el muro gris de cemento me molestaba, parecia un fantasma inmovil que lo controlaba todo. Todo un honor para los hermanos musicos que supieron a fuerza de pulmones tocarnos las fibras, esas, que nos ayudan a ponernos de pie todos los dias. Se nos llenaron los ojos de colores a pesar de la triste iluminacion. Y gracias a los bailarines atrapados por el ritmo parecia que el sol lo iluminaba todo. Mientras que el muro continuaba tosco y hasta la penumbra. Pero eso es insignicante. Me fui renovado. Gracias Qhantati!" Enrique
"Que dire? Tant le contraste était grand entre les deux parties et assez significative à mon avis de l'expression de l'écart qui peut exister entre deux civilisations, surtout quand l'une se mêle de contracter un lien avec l'autre. La première partie m'est apparue (vision très personnelle)comme la volonté sincère et pleine d'efforts de démontrer qu'il pouvait y avoir un lien entre notre conception occidentale historique de la musique que l'on qualifiera ici de "classique" et la culture musicale de l'Amérique Latine en général et des Andes en particulier. Je ne sais pas ce qui a présidé au choix de l'oeuvre interprétée par des européens qui se sentaient sans aucun doute solidaires par passion ou autres raisons des grands événements historiques qui ont présidés à la grande mais difficile histoire de la colonisation de L'amérique du Sud. Mais force est de constater que la qualité de l'interprétation de la deuxième partie, la volonté de respect rigoureux qui émanait de chaque pas de danse et de chaque mouvement des musiciens accompagnant la sincérité de l'interprétation authentique, suffisait sans emphase et avec la force du sang, à démontrer que ces peuples n'ont pas besoin de comparaison pour prouver l'existence de leur identité et de leur grandeur. Cependant, c'est bien d'avoir pu observer les deux facettes de la réalité, entre l'intérêt que l'on peut porter à l 'histoire de la musique des Andes avec ses nécessaires limites culturelles, cela mis en parallèle avec l'existence authentique de cette musique avec le défaut, regretté de tous, de sa mise hors contexte géographique (je n'étais pas le seul à m'imaginer sur place), mais qui a su captiver nos sens et nous faire percevoir ce je ne sais quoi d'indéfinissable que seuls les esprits sincères savent transmettre. Les QHANTATI sont quand même vraiment bons." Aldea Selva

QHANTATI

(Photo:Agnès)