lundi 10 octobre 2011

Le chocolat

Depuis des années on me parlait de ce film. Comme souvent, j'ai attendu 10 ans avant de regarder l'objet en question. L'idée de départ est assez banale: Vianne s'installe avec sa fille, au début des années 60, dans un petit village français sans histoires et ouvre une chocolaterie. Jusque là, je n'étais pas extrêment emballée par ce thème vu et revu du refus ou de l'acceptation de l'étranger, de l'autre différent, dans une communauté. Le film a vraiment commencé à m'intriguer lorsque des références au Mexique s'y sont glissées et que la véritable histoire du personnage joué par Juliette Binoche s'est révélée. D'origine indigène, on suppose du Mexique, Vianne suit le destin des femmes de sa lignée qui les pousse à être nomades, à suivre le vent du nord, tout en possédant cette capacité quasi magique de se servir du cacao pour faire révéler les désirs profonds des gens. Leur boisson fétiche: du cacao amer relevé avec du piment rouge. Immédiatement, je me suis mise à penser au roman de Laura Esquivel, Como agua para chocolate, dont j'avais déjà fait le commentaire ici. Cette utilisation originale de la cuisine, ce pouvoir presque magique de l'art culinaire de lire dans les pensées des gens et révéler ce qu'il y a de plus enfoui, de refoulé dans l'être humain est tout à fait le lien entre le roman et ce film. Par ailleurs, d'autres symboles très forts m'ont marquée, comme par exemple le fait pour l'héroïne de ne jamais pouvoir rester en place, d'être poussée par ce vent du nord qui l'invite toujours à aller voir ailleurs, à changer de vie, toujours guidée par le souci de réconcilier les gens avec leur moi profond. Une sorte de mission. Et puis, vers la fin du film, Vianne voit par accident se casser le récipient en terre dans lequel elle gardait précieusement les restes de sa mère. Les cendres se dispersent sur le sol, signe que cet héritage familial féminin était bien un poids pour elle et qu'elle le faisait supporter à sa fille. Fatalité de la transmission, difficulté et erreur de porter des fardeaux qui ne sont pas les nôtres. Plus tard, Vianne finit par laisser s'échapper par la fenêtre, dans le vent du nord, le reste des cendres de sa mère qu'elle avait réussi à récupérer. Le cercle est brisé, elle se libère enfin de son passé et peut regarder sereinement vers l'avenir. Un film donc qui par moments fleure bon le romantisme pour jeunes filles mais qui par ailleurs renferme un message beaucoup plus profond et interroge chacun de nous, c'est vrai, plutôt chacune, et nous pousse à nous demander quels sont les fardeaux que nous portons et qui ne sont pas à nous, jusqu'à quel point notre vie est-elle encore guidée par le fatalisme d'un destin familial que nous ne parvenons pas à briser. Une sorte de conte mi fleur bleue, mi philosophique, un peu magique aussi, sur les femmes et leur combat pour être libres.

Aucun commentaire: