jeudi 16 avril 2009

Ventre à louer

Moins cher, plus rapide que l'adoption. C'est l'argument qu'avancent les "parents" que le reportage d'Envoyé Spécial vient de présenter, des "parents" qui viennent en Inde louer le ventre d'une mère porteuse pour satisfaire leur désir d'enfant, un enfant "de leur sang". Mais je mets le mot parents entre guillemets. Cet enfant, sera-t-il le leur? Le contrat signé entre eux et la mère porteuse le dit bien: celle-ci renonce à tous ces droits sur le nouveau né. Pourtant, elle l'a porté pendant 9 mois, et sur le visage de ces femmes on ressent bien la déchirure que provoque la séparation si brutale à la naissance. Cela ne semble pas vraiment émouvoir les parents biologiques. Cet enfant est le leur, cela ne fait aucun doute. Ils ont payé pour cela. 4000 dollars. 15 ans de salaire pour cette jeune indienne de 23 ans qui a dû se cacher pendant sa grossesse très mal vue en Inde, qui de plus a failli mourir lors de l'accouchement. L'enfant a survécu, heureusement pour elle, sinon elle n'aurait pas vu la couleur de l'argent. Tout est possible nous dit le reportage, ce sont les mots des responsables des cliniques qui font ce genre d'interventions. Un enfant, deux, trois, parfois jusqu'à 7 embryons dans le ventre de la mère porteuse, pourvu que ça marche. "Ce n'est qu'un ventre à louer". Les pauvres au service des riches, des femmes sans ressources, pour qui c'est le seul espoir de pouvoir nourrir leur famille, payer des études à leurs enfants; des riches qui ne se préoccupent que de prendre l'enfant dans leurs bras avant la mère porteuse, qui se fichent pas mal de savoir ce qu'il advient d'elle après les souffrances de l'accouchement. Faux certificat de naissance, un passeport fait à la va vite et l'enfant retrouve sa terre d'origine. Mais comment lui raconteront-ils l'histoire de sa conception, de sa naissance? "Maman ne pouvait pas te porter alors une dame l'a fait pour elle... oui... on l'a payée..." "Alors vous m'avez acheté comme au supermarché?"... "Et la dame, c'est aussi ma maman?" "Tu crois que je pourrai la rencontrer?" "Non mon petit, on a juste... loué son ventre..." "Ah, alors c'est pas vraiment un humain, c'est comme une machine à fabriquer des bébés?" "Heu..."
Et d'autres questions encore, embarrassantes, qui peut être les feront douter... ou pas...
Moi je m'en pose une seule: quand les riches occidentaux considèreront-ils enfin les "sous développés" comme leurs égaux, des hommes, des hommes pareils comme le disait Francis Cabrel? Je suis écoeurée.

3 commentaires:

zench a dit…

Très pertinent !

Libération consacre un article à l'essai publié par la philosophe Sylviane Agacinski sur la "barbarie" des mères porteuses : Corps en miettes (Flammarion).

La «barbarie» des mères porteuses.

ALDEASELVA a dit…

J'en vomis!
Certes l'émission est spécialiste des sujets "limites". Mais même si celà n'existe que sporadiquement, le processus s'apparente à de l'expérimentation, aggravée de plus par le sordide coté financier de l'affaire.Face à celà, de l'athée ou du croyant, qui peut sincèrement, par cette pratique, penser avoir un socle suffisamment solide pour élaborer le justificatif de l' existence de l'enfant. Une mère peut être ce qu'elle est, mais ne pas pouvoir lui enlever le fait de nous avoir porté n'est-il pas de fait le seul justificatif de notre existence? Que va demander alors l'enfant quand il sera en mesure de raisonner, de parler et en droit de demander ? Et en droit ? si la législation du pays d'accueil vient à changer et reconnaître des droits aux mères porteuses: ne risque-t-on pas alors des enlèvements en cascades et des drames de la séquestration? Des monneyages sordides sur fond de droit du sang, droit du sol, droit utérin entre les états qui seront alors empêtrés dans des procédures sans fin, mais qui signeront alors immanquablement la fin de la stabilité affective de ces enfants?

zench a dit…

Les mères porteuses, un créneau indien [Le Monde]

Les mères porteuses indiennes ont le vent en poupe. [Presse canadienne 2007]

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