vendredi 22 janvier 2010

Grincements de dents

Au moment de la cérémonie d'investiture du président Evo Morales, qui commence là son deuxième mandat à la tête de la Bolivie, des voix s'élèvent pour discréditer cette tendance à mettre en avant les rituels indigènes et pour les caricaturer, les qualifiant même de dérives dangereuses.

Il est vrai que, comme la première fois, Evo Morales a fait organiser une cérémonie grandiose dans les ruines historiques et hautement symbolique de l'histoire du pays qui forment le site de Tiahuanacu. Debout devant la grande porte du temple de Kalasasaya, les amautas, les anciens, ont désigné le président en exercice comme le guide de tout un peuple, et par delà les frontières, de toute l'Amérique indigène jusque là opprimée. C'est la fin de l'Etat colonial qui est proclamée, ainsi que la naissance d'un nouvel Etat plurinational. Et l'opposition de sauter sur l'occasion, en témoigne ce dessin de Javier paru aujourd'hui dans le journal Opinion de Cochabamba:

On y voit un Evo Morales assis sur son trône, coiffé d'une toque et d'un habit aux motifs traditionnels, des sandales aux pieds: l'image même de l'indigène, plutôt habitué à fouler les champs de pomme de terre que les couloirs des grandes universités. Un inculte, en somme, une image du folklore. Avec sa main droite, il porte à sa bouche une feuille de coca, comme par provocation. On sait sa volonté de réhabiliter la feuille ancestrale, de contrer les interdictions et les processus d'éradication lancés par Washington, pourtant l'un des premiers pays transformateurs et consommateurs de cocaïne, contrairement à la Bolivie. Dans sa main gauche, un fouet, symbole de la justice communautaire que Morales désire remettre au goût du jour, et que Javier, singeant les propos de l'opposition, s'empresse de réduire à une politique du bâton, une grave atteinte à la démocratie, représentée ici comme un vulgaire bout de papier que Evo Morales piétine sans vergogne. Voilà donc les caractéristiques du président bolivien vu par son opposition blanche, propriétaire ou corrompue: un indigène inculte, prônant l'utilisation massive de la drogue, un autocrate sans principes, un dictateur en puissance.
Tout ce dessin, toute cette habile manipulation de la réalité, pour protester contre la nouvelle mesure du gouvernement Morales selon laquelle la date du 22 janvier devra être un jour férié, en mémoire de la mort de l'Etat colonial et de la naissance d'un nouvel Etat plurinational. Une dangereuse négation des fondements historiques du pays, selon les détracteurs de Evo, de la part d'un gouvernement qui, nous l'avons encore vu lors de ces élections présidentielles, est pourtant approuvé par une grande majorité des boliviens. Que cette cérémonie prenne une ampleur démesurée, peut-être, mais de là à soupçonner Evo Morales de vouloir installer en Bolivie une dictature raciste, voir théocratique... L'opposition l'a décidément mauvaise.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

La cérémonie en photos....
http://www.cubadebate.cu/fotorreportajes/2010/01/22/evo-morales-jura-su-segundo-mandato-fotos/