dimanche 9 mars 2008

La grande peur dans la montagne

Hier je suis tombée par hasard sur un téléfilm intitulé "La grande peur dans la montagne" que diffusait France 3, et qui m'a aussitôt attiré l'attention puisque c'est aussi et surtout le titre d'un roman de l'écrivain suisse valaisan Ramuz publié en 1925.
L'histoire se passe à la montagne, dans un village où pour améliorer les finances de la commune on décide de récupérer des pâturages situés plus haut, à Sasseneire, malgré les avertissements des vieux qui affirment que des hommes sont morts là haut il y a des années. D'ailleurs peu d'hommes du village sont volontaires pour aller y travailler. Finalement Joseph, Romain, Michel, Clou l'idiot du village et le vieux Barthélémy décident de monter ainsi qu'un petit garçon. Mais une maladie infecte les vaches, le petit qui était monté avec les hommes meurt. En bas, le maire décide d'instaurer une quarantaine. Les hommes se retrouvent donc prisonniers là-haut avec les bêtes qui meurent les unes après les autres, et des bruits mystérieux qui entourent le chalet. C'est là que commence vraiment le film, qui devient alors un huis clos d'altitude où l'atmosphère se fait de plus en plus opressante; la mort rôde -le diable, dit Barthélémy-, les hommes sont au bord de la folie. Clou puis Michel vont tour à tour dans le "pierrier", croyant y trouver de l'or, et succombent au maléfice, devenant obsédés par cette richesse. Le groupe se réduit peu à peu, les bruits de la montagne et de ses forces mystérieuses se font de plus en plus effrayants, les mouvements de caméra sont volontairement rapides et font tanguer l'image, comme si effectivement le malaise s'emparait même de la vision de la réalité et faisait tourner la tête des hommes, les rendant presque incapables de raisonner objectivement. Voulant redescendre au village, Romain se fait tuer par les gardes chargés de maintenir la quarantaine. Joseph, n'y tenant plus, se rend alors au village pour rejoindre Victorine, sa fiancée qui doit s'inquiéter pour lui. Dans le même temps, celle-ci décide de monter à la recherche de Joseph. Malheureusement, elle croise Michel qui, dans sa folie de l'or, l'oblige à descendre dans le pierrier. C'est là que Joseph la retrouvera, après que le vieux Barthélémy et Michel se soient entretués à coups de fusil. La dernière image nous montre le couple de jeunes gens qui marchent ensemble dans la montagne, fuyant vers un horizon plus clément.
Cette adaptation du roman de Ramuz aurait été magnifique si la fin n'avait pas été un peu farfelue. Dans le livre, Joseph et Victorine "ne se marièrent pas et n'eurent pas beaucoup d'enfants" comme la dernière image du film semble nous le suggérer, comme si d'ailleurs on n'avait plus assez de bobine et qu'on devait écourter l'histoire qui du coup reste en suspens et finit un peu "en eau de boudin", pardonnez moi l'expression! Chez Ramuz en effet, Victorine meurt en partant chercher Joseph à Sasseneire. Barthélémy quant à lui descend au village avec les bêtes et c'est là que les habitants, pris de folie, tuent le vieil homme ainsi que toutes les bêtes. C'est alors que le glacier qui surplombe le village craque et inonde toute la vallée.
En résumé, Ramuz ne termine pas son roman par une fin heureuse puisque c'est la nature qui l'emporte. Il insiste donc en réalité sur le combat perdu d'avance entre l'homme et la montagne, contrairement à l'adaptation télé qui elle met en relief la psychologie des personnages, les réactions des hommes et leur comportement face au danger qui les guette. Dommage que le film se termine si "mal" (trop bien en fait!), car il aurait pu être de bout en bout une magnifique réalisation...

L'Aguille du midi un jour de colère

(Photo:emi)

9 commentaires:

Anonyme a dit…

je suis d'accord avec vous j'ai trouvé que la fin n'était pas une fin au final on n'aura jamais vu un vrai méchant et on ne sait toujours pas si les vaches meurt a cause d'une plante ou par un esprit de montagne dommage.....

Arnaud 15 ans

Anonyme a dit…

Il faut avoir fréquenté la montagne de haute altitude pour savoir combien ce milieu nous est hostile. Il est dommage effectivement de dévoyer le témoignage des hommes qui y sont nés, car ce n'est qu'au prix de la réalité que l'on définit le vrai romantisme de ces lieux. Il ne faut pas oublier que la densité de population du Massif Alpin est équivalente à celle du...Sahel.

Anonyme a dit…

Bonjour! Juste pour préciser que Ramuz était... romand.

Emi a dit…

Merci! Autant pour moi...

Anonyme a dit…

Je me souviens avoir vu dans les années 60 une première et plus ancienne adaptation du roman. Je devais avoir autour des 10 ans et elle m'avait beaucoup impressionné... Si quelqu'un a des infos sur ce vieux telefilm...

Amiguet a dit…

"Hier je suis tombée par hasard sur un téléfilm intitulé "La grande peur dans la montagne" que diffusait France 3, et qui m'a aussitôt attiré l'attention puisque c'est aussi et surtout le titre d'un roman de l'écrivain suisse valaisan Ramuz publié en 1925"...

C'est faux... Charles_Ferdinand Ramuz est un auteur vaudois et non pas valaisan...

Emi a dit…

Je savais que je m'étais trompée, merci encore! Seulement un commentaire précédent disait qu'il était... romand! Alors?

Anonyme a dit…

la suisse romande comprend les cantons ou parties de cantons francophones. ce sont les cantons de vaud, genève, neuchâtel, jura et en partie de berne (jura bernois), fribourg et du valais. c-f ramuz était vaudois.

Emi a dit…

Eh bien merci pour cet éclairage, cher anonyme!