lundi 19 août 2019

Comment ne pas tomber amoureux de Galway

Comment ne pas tomber amoureux de Galway ? Voici nos conseils avisés.
Fuir l'agitation
Si le Latin quarter est le cœur de la ville, le lieu où tout se passe, the place to be, Dieu qu'il est envahi de monde et, en premier lieu, de touristes ! On y parle toutes les langues et ce melting pot de populations hétéroclites peut, de manière fort compréhensible, rebuter le puriste. Depuis quand se mélange-t-on ainsi ? L'Irlande aux Irlandais ! Ceci étant, ces derniers ne sont pas exempts de reproches, eux qui passent leur temps libre à flâner dans les rues piétonnes, à s'interpeller joyeusement en se tapant sur l'épaule ou à siroter des bières brunes durant des heures sur les tables d'un sombre pub en discutant à bâtons rompus des derniers événements sportifs et, comble de l'inutilité, de tout et de rien. Au travail, que Diable ! Et chacun chez soi ! Les amoureux de mélancolique solitude ne trouveront rien qui alimente leur spleen dans cette ville animée, bruyante et trop gaie. 


Détester la musique et l'art en général 
Violons, flûtes, percussions,  instruments à cordes, cornemuse sont une véritable torture pour les oreilles. Si vous aimez le silence, votre place n'est pas ici : les rues de Galway résonnent jour et nuit de mélodies traditionnelles et de chants entonnés en chœur par des voix ravies de ce qu'elles produisent. Il est impossible de boire un rafraîchissement seul et dans le calme tant chaque pub est le théâtre d'un concert permanent et gratuit. Un peuple aussi féru de musique ne doit pas être des plus travailleur, c'est une évidence. 
Par ailleurs, quelle drôle d'idée de ponctuer les avenues et les allées de poèmes gravés dans la pierre ! Depuis quand la poésie doit-elle s'inviter dans la cité ? N'est-elle pas faite pour rester enfermée dans les livres et les salons ? Galway est une saltimbanque, condamnons ensemble sa légèreté et sa fantaisie qui s'illustrent également dans la confection de bijoux telle la bague Claddagh que les irlandaises arborent en tant qu'anneau de fiançailles. Un simple cercle de métal ne suffisait pas, il a fallu que les joailliers se distinguent en créant un motif original que l'on porte même avec une certaine fierté. 


Abhorrer la couleur 
Galway est placée sous le signe du mauvais goût. Au lieu de se contenter du gris, du beige et du marron traditionnellement utilisés dans les constructions, elle se pique d'afficher des couleurs vives tel le rouge, le jaune, le vert, le bleu, le turquoise, le mauve et j'en passe sur ses façades, ses portes et ses fenêtres. On pourrait penser que cela est fait pour plaire aux visiteurs : même pas ! Les maisons de pêcheurs ont également droit à leur couche de peinture et on trouve aussi des touches de couleurs dans les quartiers populaires pourtant à l'écart des circuits touristiques. Ces éclats vifs donnent la nausée aux amateurs d'uniformité, de teintes discrètes et effacées. 



Vomir sur la douceur de vivre
Surtout, ne pas se rendre au Kennedy Park. Des gens oisifs y restent assis en tailleur ou allongés pendant des heures à discuter, rire, manger ou dormir sur l'herbe fraîche et tendre. Il n'est pas rare que des promeneurs qui pourtant ne s'étaient jamais croisés de leur vie entament une aimable conversation au sujet de leur petit chien ou du beau temps qu'il fait. Un lieu qui transpire le bonheur de l'instant présent. A éviter. 
De même, ne pas entrer dans les restaurants et en particulier dans certains Gastro Pubs où l'on vous servira le meilleur poisson que l'on n'a jamais pêché, pané et arrosé de citron, accompagné de frites trop savoureuses et trop croustillantes, le tout dans une ambiance chaleureuse et détendue qui frise l'obscénité. 
En ville, fuir les magasins de vêtements qui proposent des pulls, écharpes, bonnets et autres accessoires tricotés dans la laine de mouton trop douce et qui a l'insolence d'être produite localement. Cette manie qu'ont les Irlandais de s'envelopper le corps dans des lainages à la douceur rassurante a de quoi écœurer les aficionados du synthétique made in China. A raison. 
Enfin, résister à la tentation de caler son pas agacé de voyageur pressé dans ce rythme chaloupé sur lequel la ville entière se balance avec une joie non dissimulée qui vire à la niaiserie. Marcher vite. Eviter de s'attarder. Filer droit. 


Etre fâché avec les éléments
Quelle horreur que de manger un sandwich complet au pain moelleux et garni de fine sauce, tomates fraîches, poulet parfumé et autres ingrédients recherchés au bord de l'eau ! Quelle scène ridicule que de recevoir en pleine face l'écume et les embruns que le vent vous projette au visage ! Quelle idée de choisir le plein air et la nourriture faite maison qui coule le long des doigts et dont les saveurs vous restent en bouche, quand on peut aisément trouver une place assise au chaud dans un de ces temples de la restauration rapide qui fleurissent à tous les coins de rue dans toutes les villes du monde. D'accord, il y en a peu à Galway. En fait, nous n'en avons pas croisé. Mais en cherchant bien, ça doit bien se trouver. Persévérez !
Luttez contre les éléments ! Ayez en horreur ces journées où plusieurs saisons se succèdent dans un incessant ballet entre nuages et temps ensoleillé. Ne faites pas comme les Irlandais qui se saisissent de la moindre goutte de soleil pour se bronzer le nez et qui sourient sous une pluie battante. L'été, c'est l'été. L'hiver doit rester l'hiver. Soyez inflexibles sur le sujet. S'il pleut en juillet, boudez. 

Voilà quelques conseils pour ne pas tomber amoureux de Galway. Fermer les yeux et les oreilles, avoir les cinq sens en panne et l'âme cimentée par de vieilles et tenaces rancœurs envers le monde en général. Ou bien, si tout cela ne suffit pas, une méthode radicale : ne pas y mettre les pieds, jamais. 

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