lundi 26 décembre 2011

Séville en vrac

Dès mon arrivée, je pars me fondre dans les rues, comme j'ai l'habitude de le faire partout où je vais, histoire de prendre la température, de mesurer le rythme de la ville, de sentir les parfums, de repérer l'environnement sonore, de creuser les visages, de m'imprégner. C'est fou ce que Séville, par ses couleurs, certaines odeurs, sa douceur, peut ressembler à Cochabamba. J'ai presque l'impression d'être en terrain connu. Si ce n'était tout ce bruit. Les espagnols crient, hurlent, braillent, se parlent en tête à tête comme s'ils étaient sur le trottoir d'en face. Dans la rue, dans les cafés, il règne un brouhaha étourdissant, fatiguant, usant, assomant. D'un coup, j'ai très envie de retrouver ma calme Bolivie et ses gens souriants au parlé mesuré. La grande classe. Ici, c'est le désordre. On se pousse, on se bouscule, on dirait qu'il n'y a pas de place pour tout le monde. Grossièreté, vulgarité. Le renseignement gentiment demandé avec un sourire courtois reçoit souvent une réponse aboyée, visage fermé. Pourtant, malgré les sévillans, Séville est belle. Rues pavées, étroites, couronnées de balcons. Murs blancs ornés de jaune, murs rouges, volets verts, églises baroques à chaque coin de rue. Bouffées enivrantes d'encens. Vues depuis le mirador de la Plaza de la Encarnacion, les centaines d'églises semblent flotter dans le ciel bleu et la lumière claire du soir.
Une fois le premier tour effectué, je me re-perds, perds mes repères. Il n'y a rien à faire dans une ville la nuit, seule. Les bars sont bondés, les magasins saturés de bruit. Le décalage "horaire" fait que j'aurais envie de dîner quand les autres n'en sont qu'au thé. Je passe du chaud des tiendas au froid de la rue. La nuit, les bars, les klaxons, ce n'est pas pour moi. Séville, capitale de la fête? Sans doute, mais je leur laisse. De bon matin, j'aurai sûrement vu des beautés que les fêtards ne découvriront jamais.
Côté gastronomie, ça se confirme, c'est une catastrophe. C'est sur ce point que Séville est à des années lumières de Cochabamba! De la viande, du gras et de la crème... Déjeuner dans un petit restaurant traditionnel. Les autres sont hors de prix. Friture de tentacules de poulpe. Pas de dessert, évidemment. Les "postres de la casa" sortent du congélateur ou des boîtes. Chantilly en tube. Viva España.
Il est 17 heures passées et j'attends que le soleil se couche. Ici, les jours d'hiver sont plus longs, nous sommes presque en Afrique. Palmiers et orangers à foison. Soleil brûlant de décembre. Architecture musulmane et regards noirs. Nous sommes aussi un peu en Amérique. Végétation exubérante des parcs, chants des oiseaux, souvenirs des colonies, or et argent des églises, paseos et circulation anarchique. De l'Europe, nous sommes bien loin. L'Andalousie est à la croisée des cultures mais a la sienne propre et bien marquée, très ancrée. Corridas, flamenco et tapas, ce n'est pas qu'une légende.
Séville vue de la Plaza de la Encarnacion
Photo emi

Ces quelques paragraphes de notes, je les ai notés au fil des jours, au fur et à mesure des moments de déconcertation, de découverte et de fascination. Séville est un choc, un tourbillon, violence et sensualité à la fois. Au jeu de la séduction, je te bouscule et je te charme, je crois qu'elle a gagné.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

J'attends la suite avec impatience ! ça fait du bien tout ce soleil... PCR