Robert Colonna d'Istria, Histoire de la Savoie, Ed. France Empire, 2002.
Voici un excellent ouvrage sur l'histoire assez méconnue d'une région pourtant aujourd'hui de renommée internationale. De quoi combler quelques lacunes et découvrir des faits historiques et des anecdotes qui ont marqué ces territoires.
Avant de commencer le résumé historique proprement dit, l'auteur cherche à expliquer les limites géographiques de la Savoie, qui sont aussi naturelles: au Nord, le Lac Léman; à l'ouest et au sud, des fleuves (Rhône, Isère, Arc); à l'est, la ligne de crête du Massif du Mont Blanc. La question posée étant de savoir si ces montagnes ont toujours formées une frontière ou plutôt un lieu de passage. Le fait est que les cols (Mont Cenis, Saint Bernard, etc...) ont plus souvent servi de passage, de porte, entre l'est et l'ouest.
L'histoire de la Savoie commence donc il y a très longtemps. De la Préhistoire aux Romains, des évolutions considérables mais toujours dépendantes de la configuration géographique accidentée. On peut par exemple citer la route entre Albertville et Ugine qui date de l'époque romaine; Ensuite, ce n'est qu'une succession de luttes géopolitiques avec le voisinage, bagarres territoriales qui redessinent sans cesses les limites de la Savoie. Et on comprend très vite l'intelligence des ducs de Savoie, celle de manier habilement une diplomatie versatile, s'alliant tantôt aux uns, tantôt aux autres, obéissant toujours à une volonté farouche d'indépendance ainsi qu'à celle de maintenir l'intégrité des territoires. A l'époque, la Savoie est beaucoup plus vaste que la région actuelle puisqu'elle va du Léman à la Tarentaise, de Chambéry à Turin.
Le changement commence à se faire sentir lorsque les petits royaumes qui représentaient jusque là son voisinage prennent des dimensions démesurées et se tranforment en Etats, en Empires. La Savoie ne fait plus le poids. Les ducs conservent cependant leur stratégie habituelle, celle qui consiste à s'allier avec la puissance qui lui permettra de conserver son intégrité. Mais c'est une bataille inégale. La Savoie est tour à tour occupée par les Français, lieu de passage des troupes Espagnoles ou de l'Empire, servant de moyen de pression dans les négociations entre les grandes puissances. Les ducs perdent peu à peu leur pouvoir, mais pas leur prestige.
Et puis un jour, la Savoie, dans ses ambitions italiennes, penche à l'est, et la partie occidentale, attirée tour à tour par les événements révolutionnaires en France puis par le revirement politique qui redevient protecteur envers l'Eglise, finit tout naturellement par être rattachée à la France, en 1860. D'ailleurs, malgré toutes ses modifications territoriales et ses changements politiques, il semble que la Savoie ait toujours tiré sa stabilité identitaire du grand attachement qu'elle porte à la religion catholique.
Depuis, la région n'a cessé d'être partie prenante de l'histoire de la France, ni plus, ni moins que les autres régions. Les évolutions, aux XIX et XX èmes sièles, se sont considérablement accélérées: industrie, infrastructures et surtout le développement en flèche du tourisme, en ont fait la région qu'elle est aujourd'hui.
L'ouvrage de Colonna d'Istria est passionnant en ce qu'il lève le voile sur des montagnes que l'on pensait tranquilles mais qui ont au contraire connu une histoire extrêmement agitée, toujours caractérisée par un sentiment fort d'appartenance et d'identité communes. Un document essentiel, loin des clichés, à dévorer comme un roman.
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