lundi 20 juin 2011

Réveillez-vous!

Ce titre ressemble à une propagande des Témoins de Jéhova, mais non, c'est juste une réaction spontanée après avoir assisté hier au 4ème Festival du Charango à Paris.

Les deux premiers festivals avaient été une apothéose: de grands musiciens, la salle comble de l'UNESCO, des rappels et des ovations à n'en plus finir, des frissons dans la salle, des rires, de la communication entre le public et les artistes. Coca, Milchberg, Pérez, Alvis, Cavour et j'en passe étaient venus faire la promotion de cet instrument andin. L'ambassadrice Luzmila Carpio était là, avait fait un discours d'inauguration, grandiose, je vous dis.

J'avoue, j'ai raté le 3ème Festival, je ne peux donc pas vous en faire un récit direct et fidèle, mais les échos que j'en ai eu laissaient déjà pointer la déception...

Hier, à la Maison des Cultures du Monde de l'Alliance Française, 4ème festival du charango. La salle était à moitié pleine (parce que je préfère voir le côté positif) de gens tout acquis à la cause de cette manifestation culturelle et militante, pour la sauvegarde, la diffusion d'un patrimoine. Des habitués, beaucoup de français fans de musique des Andes, musiciens eux-mêmes, toujours prêts à se mobiliser et à se réunir pour participer à cette fête qu'est le Festival du Charango. De boliviens, pas des masses, en tout cas énormément moins que les années précédentes. Et je ne pense malheureusement pas que ce soit une question de prix. 17 euros, c'est assez abordable vu les artistes qui sont montés sur scène encore hier soir. Non, simplement un effet de lassitude, de l'indifférence, autre chose à faire. Et c'est là que je lance mon fameux: "réveillez vous!" C'est à vous, boliviens de Paris, de France, de diffuser, de faire vivre votre culture. Si vous mêmes vous en désintéressez, n'allez pas ensuite protester parce qu'on vous marche sur les pieds. C'est à vous d'être fiers de ce patrimoine.

Bref... Passons... Il est vrai que la nouvelle génération d'immigrés boliviens en France n'est pas du tout semblable à celle qui avait débarqué il y a 10 ou 20 ans. Les premiers étaient artistes, musiciens pour la plupart, venant en Europe avec une soif de découverte et de partage, avec un bagage culturel riche. Aujourd'hui, argent, money, plata, c'est tout ce qu'on cherche. Le Festival du Charango? Ah, oui...

Et pourtant, et pourtant... Il y en a qui ont fait des centaines de kilomètres, qui n'ont pas dormi de la nuit, qui ont déprogrammé des rendez vous, pour s'y rendre encore cette année. Parce que eux savaient ce qui les attendait. D'abord, Alfredo Coca, le parrain du Festival. Pour ma part, j'ai eu la chance de le voir jouer en France, en Bolivie, dans mon salon et je ne suis, je ne serai jamais blasée. Parce que sa manière de jouer est un festival à elle seule, parce que rien que de voir ses doigts s'envoler comme des papillons sur les cordes est un enchantement. Coca est un maestro, plus un mot, on écoute, le charango parle. J'aimerais bien savoir ce qui s'est passé dans la tête et dans le corps de mes voisins de fauteuil, de untel ou untel, de mes amis à ce moment là. Ce qui est sûr, c'est que chacun a dû ressentir quelque chose de fort.

Et que dire lorsqu'est apparu "Micou". Cette fois, j'ai bien su lire dans les yeux émerveillés de mes voisins la résurgence de quelques souvenirs pas si lointains que ça, des images du début, de la naissance d'une passion, renouvelée ce soir, comme rajeunie, revigorée par la prestation d'un maître français, un passionné, un pionnier.

Et puis tout s'est embrasé avec Bonny Alberto Teran. Huayñitos, peines et joies du nord de Potosi, chants d'amour, de ces rythmes qui font danser les mineurs et les paysans le vendredi soir et qui vous font tout oublier. Ne reste que l'allégresse. Bonny, que de souvenirs. Cette fois c'est mon voisin de fauteuil, au premier morceau, que j'ai vu s'envoler directement pour la Bolivie; ça y était, il était parti. Ce n'étaient plus des souvenirs mais un déplacement direct dans l'espace qui s'opérait.

En fait, pour ce Festival du Charango, le 4ème du nom, et pas le dernier je le souhaite, je répète, "réveillez vous", j'ai plus observé la salle que le spectacle! Et rien que pour observer des phénomènes comme ceux que je viens de vous décrire, rien que pour vivre ces moments là, ça valait le coup, et, je vous le dis, ça vaut et ça vaudra toujours le déplacement pour honorer cet instrument profondément enraciné en Bolivie, le charango.

7 commentaires:

Gilles a dit…

Salut Emi
si un jour je fonde un parti politique , je ferais appel à toi , tu n'as pas ton pareil pour haranguer les foules, pour les bousculer......et puis un peu après l'émotion de ses moments musicaux magiques que tu sais si bien décrire. Merci pour ton clin d'oeil à tes compagnons "charangophiles" sans cesse en pélerinage

Anonyme a dit…

Personnellement, j'ai presque eu de la peine pour ces artistes de les voir jouer devant si peu de monde, même si l'assistance était pendue à leurs doigts et tendue vers eux comme un corde à son arc... on dit toujours qu'il vaut mieux la qualité que la quantité mais quand même ! il y a des limites ! eux méritaient mieux, je le crois, mais je ne suis même pas sûre qu'il l'ait remarqué tellement ils ont l'air au dessus de ces contingences bassement matérielles. Eux sont tout entiers à leur art et s'effacent devant l'instrument, leur humilité m'a frappée.
Je retiens aussi la présence et la virtuosité du jeune Wilson,il m'a hypnotisée !
PCR

Anonyme a dit…

Oulala ! les "fotes" d'orthographes ! "qu'ils l'aient remarqué" évidemment, du coup tu vas peut être hésiter avant de nous envoyer les contes du Tio... ;-)
pcr

Emi a dit…

Personnellement, comme tu le sais, je suis un peu myope de la "fote"! T'en fais pas, je t'enverrai encore des contes à relire et encore des plus terribles à faire peur dans le noir! Hahahahahaaaa!!!

Gilles a dit…

les "fotes" d'ortographe (sans s à orthographe )je viens de vérifier moi j'en suis un spécialiste....
de la "fôte" ...pas de l'orthographe

Anonyme a dit…

Vous êtes gentils!...

j'aime ton rire sardonique Emi ! il fait froid dans le dos, brrrrrrrr !
pcr

aldeaselva a dit…

Mon impression de ce festival se résume d'une phrase de Terran dans une de ses innombrables compositions "... prisionero de Bolivia...".