samedi 30 octobre 2010

J'aime le train

J'aime le train, sa lenteur relative, ses arrêts innombrables sur des quais que le pied ne s'aventure jamais à fouler, escales mystérieuses entre le départ et l'arrivée. J'aime à imaginer la vie de ceux qui attendent, le destin de ceux qui descendent et l'arrière plan que cachent les grandes portes vitrées. Puis le train repart, toujours plus loin du quotidien, plus près à chaque instant d'un nouveau paysage. Mais ce qui compte c'est le voyage. L'entre-deux, les rencontres. Pendant un moment on oublie la montre et un visage familier, une proximité, une attirance amicale, on reconnaît des atomes invisibles, des signes intérieurs de ressemblance et la conversation commence. Maladroite au début, comme toutes les histoires, parlant du temps qu'il fait, de notre destination et des raisons de notre voyage. Et parfois la magie opère et la personne qui est assise en face de nous se révèle et nous appelle. C'est ainsi que j'ai parfois parcouru plus de distance en quelques heures de trains que lors de fatigants trajets en avion, assemblements de tôles sans âme et sans chaleur. Des îles grecques à l'Afrique, du soleil de Séville à la place Rouge de Moscou, de bibliothèques remplies de livres d'un professeur de linguistique au bureau d'une anthropologue, toujours les discussions m'entraînent, les voix chaudes pénètrent comme un miel sucré dans mes oreilles jusque là simplement bercées par le bruits des rails et de la pluie qui éclate sur les vitres embuées. Lorsque l'annonce prévient de l'arrivée imminente, c'est un déchirement, une petite mort, la presque certitude de ne jamais se revoir, ou simplement une carte de visite confiée à la va vite que l'on fourre fébrilement bien au fond de sa poche. J'aime le train, car je voyage dans l'histoire et dans les yeux de ses passagers.

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