Je ne veux pas parler ici du débat sur le port de l'uniforme par les élèves dans les écoles et les collèges de France, mais bien des visites que nous font de temps en temps dans nos établissements les militaires et autres policiers. Je me souviens, il y a quelques années, dans un collège classe moyenne de la banlieue parisienne, l'intervention de membres de la Légion Etrangère. A côté de moi, un collègue connaissant par coeur les paroles de la chanson "Bella Ciao", anti militariste convaincu, autant dire peu acquis à la cause de nos conférenciers d'un jour. Tout d'abord, on passe à l'assistance réunie des élèves un film sur les actions de la Légion: mise en scène soignée, combattants transpirants et maquillés, ennemis noirs africains, évidemment. Ensuite, la foire aux questions. Les élèves se renseignent. Mais comment diable une principale de collège -certes, elle-même fille de militaire, mais cela n'excuse pas tout- peut, dans le cadre d'une après midi d'information dédiée aux "métiers de l'armée", choisir d'inviter, plutôt que des techniciens susceptibles d'apporter des informations intéressants à des jeunes de quatorze ans, des légionaires véhiculant de tels préjugés arrièrés et racistes. Je cite pêle mêle: le rôle "civilisateur de l'armée" pour les recrues venant par exemple d'Afrique, "qui souvent, mangent encore avec les mains, on leur apprend donc à se servir d'une fourchette"; le soutien économique que, grâce à leur salaire, les étrangers peuvent apporter "à leur clan, à leur tribue", etc... Le public, composé d'une bonne moitié de jeunes de parents Africains ou Maghrébins, roule des yeux surpris, mi amusés, mi choqués. Certains finiront même par nous demander: "Mais madame, ils sont vraiment racistes dans l'armée?" A la fin de cette intervention mémorablement caricaturale et pathétique, la principale nous demande de nous lever et d'applaudir. Seuls, mon collègue et moi restons ostensiblement assis et silencieux, sous le regard réprobateur d'un molosse maori peu engageant.
Cette semaine, autre anecdote. Nous recevons, cette fois dans un collège "sensible" d'une banlieue de la même catégorie, la visite d'un policier venu présenter les méthodes de la maison lors des interpellations pour racket. Il s'évertue à expliquer à nos élèves (1% de blancs), les différents "types": européen, asiatique, maghrébin, africain... qui les aideront à identifier leurs agresseurs. Evidemment, dans les mises en scènes ce jour là, la victime est une charmante blondinette, je vous laisse deviner la couleur de l'agresseur. A une élève qui se dit d'origine pakistanaise, il soutient que non, elle est donc "d'origine hindoue". Quelques remarques lourdissimes plus tard sur la couleur et les origines, on se dit à nouveau que ces fameuses interventions des hommes en uniformes dans les collèges sont décidément déplacées, maladroites, chocantes, inquiétantes, voir malsaines, pour des élèves qui souvent connaissent par coeur le commissariat du quartier et qui ont une vision des lois très orientée. A quand les visites en prison ou en centre de rétention?
2 commentaires:
Je trouve ça vraiment révoltant, ces propos de classement arbitraire et néfaste au vivre ensemble, que nous tentons justement d'apprendre à nos élèves (non?). J'ai eu une bonne expérience dans mon établissement de province et dit "de quartier": nous avons rencontré les policiers de l'UPCR (Unité de prévention des conduites à risques) qui m'ont semblés humains et respectueux des jeunes, se gardant, pour être crédibles, de juger ce qu'ils ne voient que de l'extérieur...
M'enfin Emi, un peu d'humour ! Tomi Ungerer s'était bien engagé chez les "méharistes", et puis vois ce qu'il est devenu...
Je sais, je sui un peu gaie ce soir...
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