Il a tout d'un héros, Evo Morales, ce fils d'indien, dans son enfance gardien de lamas, passé de dirigeant syndical amateur de football au rang le plus élevé de la société bolivienne, celui de Président de la République. Cette biographie originale du jeune journaliste argentin Martin Sivak, ami de Evo, dresse un portrait intime et sans détours du premier président indigène d'Amérique Latine. Loin d'être une suite d'événements chronologiques froidement classés de l'enfance jusqu'au temps présent, ce travail s'articule entre des chapitres consacrés à l'époque actuelle, la présidence, et d'autres dédiés à son ascension, faits de retours en arrière sur des moments clés de la vie de Evo, comme on regarderait avec recul et une certaine admiration le chemin parcouru, un album souvenir d'étapes capitales.
Une enfance difficile certes, marquée par la pauvreté, mais déjà par l'affirmation d'un caractère hors du commun qui fait de lui un homme respecté et écouté des les premières années. Puis l'arrivée dans le Chaparé, le début de sa carrière syndicale dans le milieu des producteurs de coca. Les premières marches de protestation, les premières prises de positions, des idées qu'il ne laissera jamais de côté, même une fois arrivé au Palais Présidentiel. Tout au long du livre, on découvre un portrait précis et documenté de la situation politique, économique et sociale de la Bolivie de la fin du XX ème et du début du XXI ème siècle. A noter, quelques pages captivantes sur la fin de la présidence de Gonzalo Sanchez de Lozada, "Goni", de la gestion de Carlos Mesa et les dernières élections avant celle qui a vu Evo Morales conquérir les voix et le coeur d'une grande majorité des boliviens. En toile de fond, la guerre de l'eau en 2000, puis celle du gaz quelques années plus tard, le trop lourd tribut de morts payé pour gagner le droit de décider des ressources naturelles du pays.
La proximité de l'auteur avec Evo Morales nous permet d'entrer dans l'intimité du personnage, non qu'il s'agisse d'un livre à sensations qui dévoilerait la vie privée du Président (il faut dire qu'il n'en a quasiment pas, commençant ses journées à cinq heures du matin par un conseil des ministres et ne les terminant que très tard dans la nuit), mais au delà de cela, Martin Sivak nous présente un homme simple, avide d'apprendre, sûr de ses convictions, détestant par dessus tout l'hypocrisie et la trahison. Un homme soucieux des demandes qui lui sont constamment formulées, du poids de sa fonction et du rôle qu'il a à jouer dans l'histoire de son pays et du monde en général. Tant et si bien que certains l'ont élevé au rang de dieu vivant et lui vouent un culte sans bornes. Malgré tout, Evo, l'enfant des hauts plateaux, est avant tout un bolivien, simple, comme tous les autres, qui sait reconnaître ses lacunes mais possède une force indéniable: celle de mener la Bolivie sur un chemin encore inexploré, difficilement mais toujours avec une volonté féroce de réussir.
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