mardi 15 avril 2008

Evo à la loupe

La Bolivie vue par un Bolivien, rien de mieux pour se rendre compte de la situation réelle là-bas, sans partie pris puisque je ne ferai que retranscrire, en tentant de ne pas les modifier, les paroles et les rélféxions d'un célèbre musicien, A.C.:
Depuis l'election de Evo Morales à la tête de la Bolivie, ses compatriotes ne l'ont pas épargné. L'opposition bien sûr, les médias qu'elle contrôle ou manipule, mais aussi les boliviens eux-mêmes. En effet, la population attendait beaucoup du premier président indigène et pensait qu'il allait apporter une solution rapide à tous leurs problèmes. Le souci justement, c'est que des structures socio culturelles et socio économiques de la sorte, basées sur des relations de dominant/dominé, pouvoir/exclusion telles que les connaît la Bolivie, ne peuvent être modifiées en quelques mois lorsqu'on sait qu'elles perdurent depuis des siècles, en fait depuis la conquête espagnole et la colonisation. Si de nombreux boliviens se plaignent, c'est qu'ils ne se rendent pas compte de ce que Evo fait malgré tout, soit parce que la presse les désinforme et qu'ils ne vont pas chercher plus loin que les informations qu'on veut bien leur donner, soit parce que la mémoire leur fait défaut. Comment expliquer autrement en effet que par une amnésie collective chronique la réélection de Banzer dans les années 90 après la dictature sanglante dont il avait été le maître jusqu'en 1978? D'ailleurs si Goni (Gonzalo Sanchez de Lozada) avait été plus jeune au moment des dernières élections, il est fort possible qu'il ait également pu revenir au pouvoir.
Il est malgré tout important de ne pas généraliser, car malgré ce que l'on peut être amené à penser, la majorité des boliviens soutiennent Evo. Nous ne parlons pas forcément des mineurs qui se trouvent en ce moment pris dans d'autres problèmes (processus de re-nationalisation des mines, conflits avec les coopératives minières pour l'attribution des différentes concessions) mais plutôt et surtout des paysans qui sont une majorité et prennent conscience de leurs droits et du rôle qu'ils ont à jouer. Par ailleurs, une bonne partie des intellectuels soutient également le Président, se tenant prêts à mener à bien une revalorisation de la culture qui viendrait en appui à l'action de Evo. Ce sont dans ce cas des gens qui ont étudié et qui ont donc le recul nécessaire pour réfléchir avant de s'exprimer sur tel ou tel sujet et avant de se lancer dans l'action. Mais ces mêmes personnes sont aussi pour beaucoup issues des couches populaires, souvent d'origine indigène, et dont l'expérience de vie parfois difficile, souvent de l'ordre du combat pour s'imposer, leur a forgé un caractère propre à ne pas renoncer et à agir avec détermination.
Quant à l'opposition politique, elle n'est plus en réalité qu'une minorité. Cela s'est vu lors des différentes grèves ou manifestations où les effectifs contestataires étaient de moins en moins nombreux -malgré les images diffusées par la télévision, souvent trompeuses car ne montrant que des plans rapprochés, jamais de plans larges des rassemblements de l'opposition-. Les Départements de la Media Luna et les Comités Civicos sont donc appelés à posséder de moins en moins de moyens de pression sur le gouvernement de Evo Morales, et surtout à réduire pratiquement à néant leurs méthodes répressives envers les tentatives d'expression des paysans indigènes dont ils usaient souvent -rappelons simplement que lors de la fameuse affaire du 11 janvier 2007, ce sont les grands entrepreneurs eux-mêmes de la zone Sud de Cochabamba (en réalité les quartiers riches) qui avaient payé et armé des gens pour mater les manifestations contre le préfet Manfred Reyes Villa.
Il faut reconnaitre malgré tout, pour une analyse complète de la situation, que Evo Morales a lui aussi quelques torts. D'abord, ne voulant pas reproduire le schéma autoritaire des gouvernements précédents, il a beaucoup compté sur la consultation et la recherche du concensus, ce qui a plus constitué un obstacle au changement et à l'application rapide des réformes à entreprendre. Par ailleurs, certaines personnes de son entourage n'étaient peut-être -et ce contrairement à Evo- pas sufisamment préparées à leur rôle important au sein du gouvernement, certains manquant parfois de tact et ayant ainsi provoqué des scandales que la presse a largement relayé et amplifié. Malgré tout nous le répétons, Evo ne tombera pas, car une grande partie de la population le soutient.

3 commentaires:

Enrique a dit…

Bonjour!...et puis le jour que la Bolivie obtiendra le droit à une sortie à la mer, célà ne sera pas grâce à Evo, ça sera à cause de Evo!

Emi a dit…

Soyons réalistes, ce jour n'est pas encore arrivé. Et puis aujourd'hui Evo est surtout attendu sur des questions de politique intérieure...

Anonyme a dit…

Bonjour emi,

très soucieux des évolutions dans les pays d'amérique latine, je suis actuellement celle de la Bolivie, le texte que ton ami t'as fait parvenir concorde assez avec les analyses d'autres boliviens.

Tu donnes une image assez juste de la situation en Bolivie, mais tu minimise la tension extrême qu'il y a dans le pays. Malgré la nouvelle Constitution ou Evo avait conditionné la répatition des terres, cette Constitution qui est certes une avancée pour le peuple bolivien contient certaines lacunes au niveau de la définition des communautés indigènes et de leur délimitation du territoire.

Cela est un problème qui pourra être résolu mais comme tu le soulignes cela ne peut se faire en quelques mois.

L'oligarchie minoritaire (10% de la population ou les 100 clans)vorace et réactionnaire utilise ces lacunes et s'oppose de front au pouvoir central de Evo en organisant la fameuse consultation d'autonomie des régions le 4 février. Consultation qui va permettre à cette oligarchie de traiter ensuite avec le gouvernement central à partir de SES statuts d'autonomie. C'est vrai que Evo Morales est non seulement mal entouré mais de plus il existe autour de son entourage des gens qui jouent contre lui.

Je suis très inquiet quand à la tournure de ces événements, et bien que l'OEA, l'ONU, et l'UE ont annoncé qu'il ne reconnaîtraient pas ce "référendum" illégal puisqu'il n'émane pas de la Chambre Nationale d'Élection, les forces sociales et syndicales ont déjà annoncé qu'elles se préparent à un affrontement contre les forces fascites qui enrôlent de la jeunesses afin que cette consultation se réalise. L'oligarchie a beau jeu de fomenter cette perturbation puisqu'elle est toujours au pouvoir dans les quatre région de la "demi lune", sa visée sécessioniste qui consiste à couper le pays en deux. Elle contrôle toujours le pouvoir économique, judiciaire et territorial.

Le peuple bolivien risque d'être redépossédé des ressources naturelles que Evo Morales tente de redistribuer plus équitablement, sa lenteur fait également partie de cette contrerévolution de l'oligarchie soutenue par les EE UU.

Mais je serais prétentieux de juger de l'action de Evo avec ma vision occidentale dépourvue de l'âme et de l'esprit indigène ainsi que insuffisament imprégné des difficultés des cultures boliviennes.

J'essaie avec mes moyens de soutenir le peuple bolivien en faisant connaître la situation qui est en train de se dérouler actuellement dans ce pays ainsi que tous les peuples d'Amérique Latine qui tentent un processus de changement vers une société qui rendra au peuple ce dont il a été privé...

voir http://le tacle.canalblog.com/archives/bolivie/index.html