lundi 3 juin 2013

Salut au Grand Sud

Isabelle Autissier, Erik Orsenna, Salut au Grand Sud, 2006.
Quand une navigatrice rencontre un écrivain, lorsque deux amoureux des mots et deux assoiffés de découvertes se rejoignent sur un même bateau, ça donne cela : Salut au Grand Sud, une épopée poétique vers les terres hostiles de l'Antarctique, avec un équipage aussi bien fait de marins que d'un ornithologue, d'un réalisateur et donc, d'un écrivain. Voilà pourquoi ce livre là n'est pas un récit d'aventures comme les autres. Il y a tout d'abord cette notion de partage, de multiplicité des points de vue qui offrent des descriptions variées et enrichies de deux expériences parallèles dans la même galère. Et puis il y a cette quasi surenchère de langage, cet amour du mot juste auquel se livrent dans l'écriture tant Autissier qu'Orsenna, la première sachant jouer de la langue avec vivacité, rythme, humour et vigueur ; le second n'étant plus à présenter. Il faut vraiment aller lire en plus de celui-ci le roman d'Isabelle Autissier, L'amant de Patagonie, pour comprendre à quel point cette aventurière maritime possède un formidable talent de conteuse. 
Nous voici donc embarqués sur ce bateau à l'équipage chamarré, en direction d’Ushuaïa puis du fameux Cap Horn, rendu célèbre par la difficulté de son franchissement. C'est à cet endroit précis que commence le voyage incroyable vers des terres que l'on croirait inhabitées mais où se sont installées diverses missions scientifiques du monde entier. Des terres également riches d'histoires toutes plus saisissantes les unes que les autres, de bateaux bloqués par les glaces, d'équipages prisonniers des terres du grand sud, de découvreurs et de savants obstinés. L'Antarctique, continent peuplé de fantômes et de légendes que nos amis dépoussièrent en abordant chacune des nouvelles terres de leur périple, sans trop s'appesantir sur leur propre navigation. Nous évitons ainsi les couplets trop techniques, souvent cause d'ennui chez les non initiés, pour laisser une plus grande place à l'expression de l'émerveillement face à ces paysages qui n'ont rien d'uniforme. Nous pensions l'Antarctique vide, il est peuplé d'un fourmillement d'espèces animales et d'humains passionnés ; nous le pensions plat et morne, blanc à la limite de l’écœurement, le voici montagneux, ponctué de lac aux couleurs infinies, meublé d'icebergs mouvants à la physionomie polymorphe. 
Une épopée passionnante et toute simple, une aventure humaine, les copains d'abord.

Aucun commentaire: