Après avoir parcouru, en voiture et à pied, la côte basque de Bidart à Hendaye ; après avoir fait des sauts de puces, garé le véhicule, remis la veste, chaussé le sac à dos, marché, visité, mesuré, ressenti, humé, quitté le sac et la veste, repris le véhicule, roulé encore, on se demande si nous disposons encore de l'énergie nécessaire pour franchir enfin la frontière et rencontrer San Sebastian que nous avions désigné comme le point final de cette longue journée. Finalement, avec le zeste de curiosité nécessaire à la poursuite du périple, nous nous décidons. Concentration extrême, lecture des panneaux, feeling, sens de l'orientation, débrouillardise, nous voilà dans un parking souterrain. Avec cette histoire de ne pas vraiment savoir où on allait, on n'a même pas prêté attention à ce qui nous entourait. On a juste dit "oui, ce n'est pas trop moche" tandis qu'on opérait un tour complet de rond-point pour repartir en sens inverse. Ce n'est qu'en remontant à la surface de la terre, au niveau de la mer, que l'on réalise véritablement que San Sebastian a mille atouts pour nous séduire.
D'abord, les grandes avenues sont bordées d'immeubles chics, élégants, dignes et fiers. Ensuite, il y a ces ponts ornés de superbes lampadaires un peu rococo, mais qui sont tout à fait à leur place dans cette scène quasi théâtrale. D'ailleurs, malgré son ambitieuse modernité, le palais des Congrès Kursaal, cube de verre faisant face à l'océan, ne dénote absolument pas dans ce décor où tout est permis. De l'autre côté du pont, le théâtre Victoria Eugenia se la pète grave. On l'a compris, à San Sebastian, on ne fait pas dans la demi-mesure.
Allons vers l'intérieur. Au centre du boulevard Zumardia, la promenade est paisible et longe des dizaines de mètres de magasins, de cafés et de restaurants, mais nous préférons arpenter les ruelles. Nos pas nous conduisent à travers des rues dont les balcons aux fenêtres nous rappellent que nous sommes en Espagne. Finalement, nous arrivons à la plaza de la Constitucion où des enfants jouent au football et où des vieux sirotent une bière ou un café, en terrasse. Ce que les voisins français aiment à retrouver en se rendant régulièrement à San Sebastian, c'est cette ambiance estivale en permanence, cette coutume de vivre dehors et de peupler les rues (sans doute à cause de l'étroitesse des appartements, mais peu importe la cause, pourvu que le résultat nous séduise). Il est vrai que les gens déambulent, rient, bavardent énergiquement, vont et viennent bras dessus, bras dessous dans le parc qui borde l'océan et au bout duquel trône l'hôtel de ville.
Le soleil décline et nous ne nous lassons pas de cette envoûtante baie de la Concha, ce coquillage marin arrondi et maternel, paume de la main, au centre duquel l'île de Santa Clara fait comme un rappel de la terre avant l'immensité océanique. Il faut bien le dire, nous pavanons. Car, à San Sebastian, on ne se prend pas pour n'importe qui. Immédiatement, dès qu'on en foule le sol, c'est une ville qui incite à se redresser, à marcher tête haute ; une cité qui révèle la beauté et dans laquelle on ne peut que se sentir riche. De ce que l'on voit, de ce que l'on ressent. Riche de bijoux, de ciels, de sable doré et de soleil. Riche de l'expérience d'avoir franchi la frontière. Riche de cette belle rencontre.
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