samedi 20 avril 2019

Escapade basque : la villa Arnaga

Parmi les personnalités qui ont un rapport avec le Pays Basque, il y a bien entendu quelques footballeurs illustres, Luis Mariano, Georges Guérary, Maurice Ravel (dans un autre registre) et Edmond Rostand. Il faut l'avouer, nous ne savons pas grand chose sur le bonhomme. Tout juste Cyrano. Au comble de notre ignorance, sans savoir pourquoi ni comment, nous avions même gratifié son patronyme d'une particule. Il s'agissait de ne pas faire trop d'impairs lors de la visite de cette villa emblématique. 
Nous nous étions rendus à Cambo les Bains, ville thermale fleurie, verte et chic, comme toutes les villes d'eaux du monde, mais c'est la villa Arnaga, située un peu à l'extérieur, qui nous a attirés. Onze heures trente, nous nous présentons à l'accueil. Très gentiment, la dame chargée de nous délivrer les entrées nous conseille de revenir plus tard, dans l'après-midi, car nous ne disposons que d'une petite heure pour parcourir les vingt pièces de la demeure, ainsi que ses jardins. Selon elle, c'est trop peu. Peu nous importe : nous n'avons pas l'intention de lire l'entièreté des explications et nous nous pensons en meilleure forme, sans aucune espèce de mépris de notre part, que la plupart des visiteurs retraités du jour. En effet, après quelques minutes à suivre une allée du parc, nous voici devant la villa. Il s'agit d'une imposante demeure de style basque que l'écrivain a fait bâtir au début du XXème siècle et dont la construction n'aura duré que trois ans. Une sorte de caprice monumental. Il est vrai que le résultat est digne d'admiration. Toutefois, l'intérieur nous déroute. Les décors sont extrêmement chargés, théâtraux, colorés, presque étouffants. Il faut dire que Rostand a tenu expressément à ce que les meilleurs artistes du moment s'expriment sur les murs de sa maison, quitte à surcharger les surfaces. Dans la salle à manger, devant cet étalage de boiseries et de marbre, on se demande un instant si le monsieur n'en a pas fait "un tout petit peu trop"... On lui pardonne, mais s'il s'agissait d'y habiter (pourquoi s'interdire de rêver ?), nous apporterions à l'ensemble une bonne dose de sobriété. Il n'y a guère que la cuisine et la salle de bains ensoleillée qui nous ravissent. En réalité, dans chacune des pièces que nous explorons, c'est vers les fenêtres que nous sommes attirés et vers cette vue, tant à l'avant qu'à l'arrière de la villa, sur les jardins. Une fois les vingt-et-une salles visitées, nous nous empressons de sortir. Il fait beau, pourquoi rester enfermés plus longtemps ? 
Effectivement, la réalité ne dément pas l'impression que nous en avions. Nous commençons par nous émerveiller du jardin anglais avec ses arbres vénérables qui forment un entrelacement de feuillages divers. Il faut dire que Rostand, dans le genre impatient, avait refusé tout net de devoir suivre la lente évolution d'arbrisseaux à peine naissants sous ses fenêtres. Il a exigé que l'on apporte des spécimens déjà grands et dont le transport jusqu'à la villa n'a pas dû être une mince affaire. Sur le côté, une tonnelle dégoulinante d'odorantes glycines nous conduit jusqu'aux jardins à la française. Plus sévères, tracés au cordeau, ils se prêtent moins à la rêverie poétique qu'à la contemplation de la nature domptée. Pourtant, on ne peut pas dire qu'ils aient un aspect désagréable : les jets d'eaux, la colonnade et le bassin reflétant la villa forment un panorama tout à fait supportable. D'ailleurs, on se dit que, pour un artiste en recherche d'un calme inspirant et propice à la création, le lieu est assez idéal. Nous saluons les poules dont les looks variés témoignent d'une certaine originalité (en matière de poules, nous sommes tout aussi ignorants que dans le domaine littéraire), puis quittons les lieux avec l'impression d'avoir pénétré dans une demeure de contes de fées, dans un jardin merveilleux en dehors du temps. 






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