Yanacocha, c'est l'histoire de sommes pharaoniques perdues par la France sans que personne ou presque ne sourcille. Le livre rassemble des preuves irréfutables et des éléments majeurs pour former une enquête quasi exhaustive sur ce sujet brûlant. La mine de Yanacocha, la plus grande d'Amérique Latine à ciel ouvert, est située au nord du Pérou et promet dès le début de son exploitation à haute dose en 1981 de multiplier les bénéfices. C'est le BRGM (Bureau de Recherches Géologiques et Minières) qui lance véritablement son succès et c'est à partir de cette étude prometteuse que des sociétés d'exploitation se dispute le gâteau. Tout se passe bien jusqu'à ce qu'en 1993, le BRGM décide de privatiser ses parts de Yanacocha. Les Américains de Newmont prennent mal le fait que l'Etat français leur préfère les Australiens de Normandy. Ils attaquent la France en justice et c'est là que la magouille commence. Nous sommes en pleine dictature de Fujimori et de son sbire Montesinos. Afin de favoriser les Américains face à la France, la corruption des juges va bon train. On les achète, on les manipule et, dans le cas où ils ne se prêtent pas au jeu de la manipulation, on les torture. Impossible de gagner face à un système crapuleux aussi institutionnalisé. Ce qui frappe au milieu de ce marasme, c'est qu'une fois la dictature tombée et les preuves de toutes ces machinations révélées au grand jour (notamment un arrangement avec le calendrier qui permet de sous-estimer volontairement le potentiel financier de la mine), la France n'en profite pas pour réclamer justice. Expropriés de la mine de Yanacocha par des Péruviens téléguidés par les Américains, les Français baissent la tête et parmi eux, l'attitude de Claude Allègre pose question. Selon l'ouvrage, l'ancien directeur du BRGM puis ministre de l'Education Nationale, aurait eu de très (trop ?) bonnes relations avec les dirigeants péruviens et aurait plus brillé par des notes de frais monumentales que par son aptitude à défendre les intérêts français. Toujours selon Gawsewitch, le seul héros de l'histoire serait Patrick Maugein, ce mania du pétrole, businessman, don Quichotte, David face à Goliath, l'unique redresseur de torts dans cette affaire.
(désolée, deuxième bouquin pour lequel l'inspiration photo est proche de zéro !)
A vrai dire, il faut baigner dans ce milieu pour saisir tous les détails du problème Yanacocha. Le monde des affaires, du business et des gros sous est vraiment un univers à part. Ce que l'on en retient lorsque, par chance, on a un peu de distance avec ce microcosme qui manipule des macro sommes, c'est l'aptitude à manigancer, à rechercher le profit partout où il se trouve, à former des alliances parfois contre nature avec des régimes politiques douteux dans le seul but de faire cracher à la nature tout ce qu'elle peut produire de richesses. Qu'il s'agisse de pétrole ou d'or, on comprend bien que la question écologique n'est même pas périphérique, elle est tout simplement absente. Elle n'apparaît à aucun endroit dans le livre. Le mercure et le cyanure peuvent s'infiltrer dans les rivières, de l'eau passera sous les ponts avant que les multinationales ne s'en préoccupent.
En résumé, outre le fonctionnement économique ultra libéral d'une exploitation minière, on en apprend beaucoup sur les ficelles de ce qu'on appelle une "affaire", les coups bas, les écoutes téléphoniques, les entretiens privés, la diffamation et les conflits d'intérêts. Et puis, bien évidemment, on réalise combien les puissants ont une fâcheuse tendance à pactiser avec les régimes dictatoriaux dans le cas où leurs gros sous sont en jeu. Ardu mais passionnant.
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