Il est loin le temps où, entre palavasiens, on allait ensemble jeter une gerbe dans la mer après la messe et où, pour le déjeuner fait de poisson, on sortait les tables dans la rue. Aujourd'hui, la Fête de la mer attire les foules et figure dans les "incontournables" des guides touristiques. Cependant, les fondamentaux demeurent et les moments clés sont les mêmes depuis les années 50.
D'abord, les fidèles se retrouvent dans l'église pour la messe en compagnie de Saint Pierre, le patron des pêcheurs. A la fin de la cérémonie, le saint, porté par quelques bras vigoureux, est amené jusqu'au port en procession dans sa célèbre barque remplie de fleurs. Il est accompagné par de la musique, jouée par l'Harmonie locale et par un groupe invité : cette année, l'Harmonie de Bourges participait à la fête. C'était l'occasion de la vivre de l'intérieur, de se mêler à la foule tout en prenant une part active au défilé. Avant de se jeter à l'eau, un arrêt est fait devant le monument aux morts pour honorer les soldats qui ont donné leur vie pendant les différentes guerres. Marins, soldats, même combat. Pourquoi pas. Une Marseillaise plus tard, nous voilà repartis le long des canaux et, enfin, c'est l'arrivée au port. Les musiciens embarquent sur un bateau, les officiels sur un autre et Saint Pierre dans sa propre embarcation. Tout ce beau monde se réunit au large pour déposer quelques gerbes, bénir les bateaux, les marins, les musiciens et tout le toutim, et pour jouer un peu de musique.
De retour à terre, les discours des officiels s'enchaînent. Chacun fait parler son égo. Politique, quand tu nous tiens. Mais ce qu'attendent les gens, outre cet hymne joué en commun par tous les musiciens, "Méditerranée", chant de circonstance, ce sont les réjouissances gastronomiques. D'abord, l'apéritif, puis, le clou du spectacle : la distribution de la fameuse "rouille".
Zoom sur un plat qui n'est pas qu'un plat
Il y a de multiples recettes de rouille et, comme la plupart des spécialités gastronomiques, chacun a sa manière propre de la confectionner. Par ailleurs, il existe une forte dissension entre l'est et l'ouest - Palavas et Sète - quant à la préparation de la rouille. Histoire de se démarquer en toute élégance a été créée la Confrérie de la rouille palavasienne dont les costumes jaunes et rouges sont ornés d'un poulpe, ce qui semble indiquer leur préférence, au détriment de la sèche, plutôt prônée à Sète. Qu'importe, la base est identique : une sauce à base de tomate, de vin blanc, de laurier dans laquelle fondent les pommes de terre et les crustacés et à laquelle, au dernier moment, on ajoute le célèbre aïoli, ce qui contribue à donner au plat la teinte qui justifie son nom. Lors de la fête de la mer, ce sont donc les membres de la confrérie qui, au terme d'une attente fiévreuse et remplie de suspense et habillés de leurs tabliers, servent enfin la rouille à tous les présents. Un moment qui tient presque du religieux.
Un drôle de mélange
Si la préparation de la rouille obéit à des règles précises, le contenu de la fête ressemble plus à un gloubi boulga de religion, de politique et de gastronomie dans lequel le touriste attentif aura un peu de mal à se retrouver. L'observateur moins avisé se contentera d'un sourire béat sous les lumières multicolores du feu d'artifice final. Pourtant, à y regarder de plus près, ce qui est en jeu n'est rien d'autre que la perpétuation des traditions, lors de cette fête gaie, animée, pleine de ferveur, de musique, de réjouissances gustatives et de Méditerranée.
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