Bernard Ollivier, c'est ce retraité qui, malmené par la vie, en recherche d'un sens à la suite de son existence, poussé par un besoin irrépressible de marcher, se met en route avec ses godillots et son sac à dos. D'abord, il entreprend de faire le pèlerinage jusqu'à Compostelle. Puis, toujours en solitaire, il se lance sur la mythique route de la Soie. Au terme de ces expériences qui ont la capacité de changer un homme, il décide de créer l'Association Seuil dans une démarche anti égoïste. Si les chemins l'ont aidé à se remettre en selle, il doit en faire profiter les autres. Il a déjà eu vent d'expériences de marche pour aider de jeunes délinquants à s'en sortir, notamment en Belgique avec l'association Oikoten. L'idée germe dans sa tête et, en 2003, l'association Seuil est officiellement créée. L'idée est la suivante : grâce à la marche, donner un coup de pouce à la résilience pour des jeunes en rupture et qui sont aux portes de la prison. Et vous savez quoi ? ça marche. On peut lire sur le site que 95% des jeunes qui ont marché avec Seuil parviennent à une réinsertion.
Les casseroles que ces jeunes ont a traîner sont souvent plus lourdes que le sac à dos. Pour qui n'est plus habitué à la discipline, avoir un but, se fixer un objectif et le suivre jusqu'au bout n'est pas évident. D'autant que les marches se font à l'étranger et durent plusieurs mois. Il est difficile de se couper de son quotidien, de se retrouver seul avec soi-même, ses doutes et ses démons, et la tentation de tout envoyer promener et d'arrêter arrive assez rapidement dans le parcours. Les accompagnateurs sont là pour ça, pour remotiver le jeune, l'encourager et lui prouver qu'il peut réussir. Au fond, le premier pas, le plus difficile, était la décision de partir et, si ce premier pas a été fait, les autres doivent forcément suivre. Dans ce livre, Bernard Ollivier a recontacté un échantillon de quatorze garçons et filles qui ont participé à des marches. Afin de brosser un portrait réaliste des adolescents qui ont effectué ces parcours, il a opté pour une variété dans les témoignages : de la réinsertion réussie à l'échec. Or, on se rend bien compte que même si un parcours a été interrompu, la trace qu'il laisse dans le corps et dans l'esprit de celui qui l'a mené à bien, même à moitié, est indélébile et le marque à jamais dans sa manière d'affronter la vie.
Il faut lire ce livre et voir le très bon documentaire dans lequel la réalisatrice Stéphanie Paillet nous permet de suivre une jeune marcheuse sur la route de sa résilience. Il faut vraiment se pencher sur ce sujet. Il faut enfin comprendre que l'enfermement ne mène à rien (il suffit de constater les chiffres effarants de la récidive après un passage en prison) ; que rien ne vaut les grands espaces pour éprouver ses capacités ; qu'on ne peut avancer qu'en liberté.
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