Presque 10 ans. Presque 10 ans d'enseignement et de vie en région parisienne. Et c'est le départ vers une autre aventure. Je ne vais pas faire dans le larmoyant, je ne vais pas sombrer dans le personnel. Par ces quelques lignes, je voulais juste partager avec vous, chers lecteurs, mes impressions à l'heure de l'au-revoir, un regard rapide en arrière avant de le projeter définitivement vers l'avant, un coup d’œil sur tous ces moments vécus et ces gens rencontrés. De belles personnes, des êtres dotés d'une sage intelligence, je passerai sur les inintéressants, les râleurs, les rabat-joie et les porteurs d’œillères, et croyez-moi si vous le voulez, j'en ai croisé des tonnes. Non, je m'arrêterai plutôt sur les profs géniaux que j'ai croisés, remplis de dynamisme malgré les difficultés de ce travail trop souvent dévalorisé. Ces gens-là font un boulot monstre, se démènent pour les élèves, ne sont jamais absents, viennent même quand ils sont malades alors qu'ils devraient rester sous la couette. Ce sont des optimistes acharnés, des volontaires, des consciencieux, des courageux. Car oui, le métier d'enseignant est un très beau métier, et il mérite qu'on le remette à sa juste place, qu'on le considère à sa juste valeur. Que de coups de gueule en salle des profs, que de ras-le-bol parfois, de désillusions, de fatigues, mais quel bonheur d'avoir travaillé avec des gens comme ça.
Et puis, il y a le contexte. La banlieue parisienne n'est pas ce qu'on dit d'elle. Parfois, elle est pire ; mais souvent, elle est bien plus attachante que ce qu'on pense. Il y a dans ces cités des gens formidables, des femmes, surtout, dotées d'un courage et d'un sourire auxquels je voulais rendre hommage. Pour avoir passé des heures à bavarder au 10ème étage des tours et des barres, pour y avoir tissé des liens d'amitié plus solides que dans les beaux quartiers où j'avais pourtant choisi d'habiter, je me sens légitime pour témoigner des richesses humaines qui se cachent au creux du béton. Les jeunes que j'ai côtoyés ne sont pas étrangers à cette vision positive. Je vous rassure, je ne suis pas naïve, je n'ai aucune envie d'embellir une réalité qui peut également être grise, bruyante, monotone, agressive. Mais je préfère simplement vous raconter les belles rencontres avec des adolescents, ceux qui ont marqué ces dix ans et dont je me souviendrai toute ma vie. Des enfants à l'esprit vif et ambitieux, des acharnés du travail, des avec des rêves au bout du nez qui leur pendent comme une carotte et qui les font avancer ; des qui ont fait de grandes études (l'une de mes premières élèves est quand même un futur grand médecin ! une autre fait des études brillantes dans un grand lycée !), qui m'ont montré des talents incroyables de danseurs, de poètes, de reporters, d'humoristes, de diplomates ; des avec qui j'ai pu avoir de longues conversations sur la vie, le monde, l'avenir ; des visages qui resteront gravés.
Alors, voilà, tout s'arrête ici. Fin de l'histoire, terminus, tout le monde descend. Je m'en vais maintenant vers une autre aventure, une autre région. Sans regrets, avec beaucoup d'envie et de soulagement, mais avec un petit pincement quand même dans un petit coin du cœur, parce que 10 ans, ce n'est pas rien. On sait ce qu'on perd... Oui, vraiment, j'ai bien conscience de ce que je laisse derrière moi d'amitiés, d'expériences, de souvenirs.
8 commentaires:
Ce n'est pas un terminus, personne ne descend. Tu les emportes avec toi et t'aideront surement !
Bien d'accord, tu quittes un endroit pour aller ailleurs et ça c'est toujours positif!
Je partage cet hommage rendu aux jeunes de nos cités et banlieues françaises. Ce que je me dis, c'est que souvent ils ont une telle force de résistance, une telle rage de vaincre, une telle capacité à se jouer du destin, que nous leur laissons dans notre société un minimum de place, parce que si nous la leur laissions entière, ils nous donneraient les leçons que nous avons trop peur de prendre.
«Si tu diffères de moi, mon frère, loin de me léser, tu m'enrichis.»
[Antoine de Saint-Exupéry]
C'est beau Emi...
... Et elle s'en va où la ptite dame, si c'est pas indiscret ?
La réponse se cache dans l'un des articles suivants... !
je creuse...je creuse ,mais suis-je au bon endroit ?
Tu as mal visé ! Je ne serai pas au bord d'une rivière mais au bord d'un canal !
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