mercredi 21 décembre 2016

La parole est aux expats ! Julien, California dreamin'...

1. Mais qu'est-ce qui t'a pris d'aller vivre à San Francisco ?
Y a pire, non ? Ma femme et moi voulions partir dans un pays anglophone. J'ai postulé un peu partout sans grand espoir. En fait, San Francisco voulait bien de nous. Ni une ni deux, nous avons foncé ! S’il y avait un endroit où je souhaitais aller aux Etats-Unis, c’était bien là. Ca cristallisait tous mes fantasmes. Ma femme rêvait de partir vivre aux Etats-Unis. Il faut dire aussi que j’étais très casanier et qu’il me fallait cette épreuve bourrée de challenges (comme ils disent). Et puis, à deux, c’est mieux… 
2. Un coup de cœur ? 
Des tonnes ! On a prévu de repartir ! En plus, on a ramené un petit Madison dont nous sommes très fiers et que nous aimerions voir parler anglais sans l’accent du Sud (ou du moins pas trop). Ma femme ne veut plus vivre ailleurs et ce, malgré les difficultés qu’impose la vie là-bas. La Californie est vraiment un très bel état dont je n’ai eu l’occasion de voir qu’une partie. San Francisco en est une facette. Sans parler des Etats-Unis dont je n’ai vu que des bribes. Le baseball que je suis avec beaucoup de ferveur. Les américains avec qui j’ai lié des contacts (qu’il me faut entretenir malgré la distance). 

3. Un coup de gueule ? 
Ben non. Je regarde en arrière et je me dis que le boulot d’un expatrié, c’est de s’adapter. Ce que nous avons fait du mieux que nous avons pu. En fait, j’ai un regard beaucoup moins acerbe sur les Etats-Unis que sur la France. Sans doute par ignorance de ce qui s’y passe réellement. Sans doute parce que vivre dans un pays où l’on n'est pas né te fait te comporter différemment. Il y a quand même quelque chose qui est bouleversant, dans le sens péjoratif du terme, c’est la pauvreté et la misère que l’on retrouve à SF. Le quartier du Tenderloin en est un exemple frappant. Des sans domicile fixe errent littéralement dans les rues, la came est un fléau, peu de soins sont mis à leur disposition (et encore, San Francisco est un modèle aux Etats-Unis). Dans ce même quartier, circulent les bus de Google, Facebook et de toutes les multinationales de la Silicon Valley. Je crois que c’est quand même un truc auquel personne ne s’habitue. Aussi, le système médical que nous avons vécu sous deux angles différents. Un séjour aux urgences des pauvres et un autre à la maternité des riches. Je ne rentre pas dans les détails parce que ces histoires m’appartiennent mais ça suffit à résumer le constat-coup de gueule… 
4. Prof aux USA, prof en France, même combat ? 
Nan ! Mon expérience aux Etats-Unis m’a apporté beaucoup d’expériences enrichissantes, dont le contact avec des profs d’autres origines. Mais travailler pour une école privée est une expérience stressante, bien qu’enrichissante. Le truc, c’est que tu as un chef qui n’a pas du tout les mêmes idées que toi sur l’éducation et qui pense à l’avenir de l’école pendant que toi, tu penses à l’avenir des élèves. Ca fait un peu mielleux comme ça et un peu excessif aussi. Les chefs ont quand même un intérêt pour leurs élèves. Mais cette liberté (relative) qu’ont les professeurs en France leur permet de s’exprimer, d’innover et de laisser mariner leur pratique pour qu’elle gagne en profondeur, en saveur, en efficacité. Quand le progrès et l’évolution sont deux maîtres mots, c’est tout simplement contre-productif, comme si on tirait sur une plante pour qu’elle pousse plus vite. La classe inversée à tout va et le blended learning comme seule motivation ne me conviennent pas et surtout sans parcimonie, pas d’intérêt. Je l’ai toujours dit, je n’étais pas prêt à perdre mes valeurs pour rester là-bas. Je ne les ai pas perdues, mais je ne me suis pas fait que des amis… 
5. A quelques mois de ton retour, encore dans le brouillard ? 
Nous nous sommes posés mais l’expérience a été trop courte et nous souhaitons repartir. Nous sommes dans une région jolie mais où il y a trop de parisiens. C'est très bien : c’est un moteur pour repartir ! En fait, on évite de trop parler de SF, c’est un sujet épineux. Du coup, c’est comme un lointain souvenir qui se noie dans le brouillard. « When you own the world, you're always home » pourrait être mon slogan maintenant. Je préfère être pauvre loin que riche en France (et en région parisienne n’en parlons même pas). Le retour me fait quand même réaliser que ce que j’ai vécu, les gens que j’ai côtoyés et le pays dans lequel j’ai passé trois ans, m’ont rendus bien plus fort, bien plus solide que je ne l’étais auparavant. Je n’aurai pas épargné les vieux poncifs mais c’est vraiment ce que je ressens. Comme la musique ! La tension réduit et tout va mieux mais d’un autre côté, sans tension pas de réduction, pas de musique (ou alors de la soupe). On est en phase de réduction, les accords s’enchaînent tranquillement mais on attend un peu que les dissonances de l’expatrié reviennent… C’est aussi un peu égoïste mais j’avais besoin de ces défis pour évoluer en tant que personne. 

6. Avec Trump au pouvoir, tu y serais allé quand même ? 
Alors c’est une excellente question. Je suis très intéressé par la politique mais je vois clairement que ce n’est pas elle qui donnera les solutions à nos problèmes. En fait, je suis en train de penser comme la plupart des français que je dois vivre ma vie malgré les politiques menées. Je reste curieux concernant les décisions prises par les gouvernements des pays dans lesquels je vis mais j’essaie de me faire une raison et d’avancer contre le courant. Après tout un climato-sceptique à la tête des instances environnementales, ça me paraît tout à fait logique quand on est climato-sceptique soi-même et qu’on souhaite faire de l’argent. Le peuple n’est pas idiot, on s’en est aperçu récemment (Brexit, Trump, primaire de la droite…) Voyons où cela nous mène et quelles conclusions en tirons-nous… Un ami américain est pourtant surpris qu’on souhaite retourner là bas. Nous repartirions demain si nous pouvions…

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