dimanche 31 mars 2013

Chauvigny et Saint Savin

Rien de tel par une journée de pluie et de brouillard que d'aller voir les contours de Chauvigny dans la brume. Après les étendues planes inondées et fertiles, les ruines du château se dessinent sur les hauteurs, mystérieuses, habitées, habillées de gaze. De plus près, on pénètre dans des ruelles aux murailles détrempées. D'anciens escaliers s'élèvent et se fondent dans le ciel gris. Le silence est total. Tout en haut du village, nous pénétrons dans la Collégiale Saint Pierre, dont les colonnes peintes nous ramènent à la mosquée de Cordoue et à l'art arabo-andalou. Un trésor médiéval au coeur du Poitou. 



Nous continuons notre route vers la ville de Saint Savin sur Gartempe, où l'abbaye comporte les mêmes peintures et les mêmes colonnes monumentales que Chauvigny. L'obscurité des chapelles, sous l'autel, nous ramène aux cryptes clandestines des premiers chrétiens. A l'extérieur, le clocher lance sa flèche vers les hauteurs. Nous levons la tête et laissons nos yeux s'inonder de pluie pour l'admirer.

Sous le soleil, il faudra absolument déambuler dans ces deux villes mais, enveloppées dans ce brouillard, elles prennent un relief encore plus magistral.



jeudi 28 mars 2013

Essaie encore une fois

Essaie encore une fois. Renie-toi. Maquille-toi un peu, ça passera. Raidis-toi, franchis la porte. Mens-toi un peu, ça fait moins mal. Revêts la carapace, le costume, ton armure. Le seuil franchi, ferme les yeux intérieurs, n'ouvre que ceux dont tu as besoin pour conduire, te diriger dans la ville. Ne fonce pas dans un mur. Quoique. Chaussures à talon pour voir ta duperie de haut, sans te tordre la cheville, même si tu te tords les boyaux. Renferme-toi dans ta voiture. C'est parti. Mesdames et messieurs, le spectacle va commencer ! Avec ce petit numéro de cirque, tu es passé maître dans l'art de l'illusion. Tu joues si bien ton rôle qui tu finirais presque par y croire. Certains ne sont pas dupes, alors tu forces le trait, tu exagères, tu obtempères. Descends de voiture, dernière bouffée d'air, saturée du souffre de la dernière cigarette. Renferme-toi dans ton bureau. Étouffe toi. Condamnation, c'est pire qu'une geôle. Tu as pris perpète. Emmêlé dans tes propres mécanismes, tu t'es tellement renié, tu t'es tellement menti que tu ne peux même plus t'avouer la vérité, que tu n'en as pas la force, pas le cran. Tu es pris dans tes propres filets. Poisson pêché, pigeon piégé. La journée se termine. Tu sors sans regarder derrière toi. Retiens ton souffle, plus que quelques mètres. Le trottoir, la voiture, la clé, le contact, le moteur. Retour à l'envoyeur. Encore un jour de fait. Raye-le. Bagnard. A la fin de la ligne, raye toute la semaine. Raye avec la sueur de ta frustration, raye le rêve, raye l'ailleurs, raye l'autre chose, raye l'envie, raye le allez en avant, raye l'après, raye ton nom. Jour suivant. Essaie encore une fois. Non. Renie-toi. Non. Maquille-toi ça passera. Non, ça ne passera pas parce que je casse. Je me casse. Aujourd'hui, vado via. Et demain ? Essaie encore une fois.

Vado via






mercredi 27 mars 2013

Colline

Jean Giono, Colline, 1929.
Autant je me serai crue dans un huis clos de Garcia Lorca, autant la langue diffère par sa rudesse, son immédiateté. Elle est brute, comme une pépite avant le polissage, directe, parfois violente. Les images aussi le sont, l'ambiance. C'est ce qui me fait rapprocher cette lecture des oeuvres de Lorca. Cette description hallucinée de la terre, des gens qui y vivent, tous tourmentés, rongés de non-dits et de reproches, peuplés de peurs sourdes qui les mènent jusqu'au délire. Plus qu'un hymne à la terre, on voit surtout dans Colline cette extravagance des gens simples, leur acharnement à lutter contre des forces invisibles et vues comme diaboliques. Un grand frisson écrit d'un trait, comme une source jaillissante de mots attrapés par des mains rugueuses, juste avant qu'elle ne se tarisse. 

vendredi 22 mars 2013

Ce que je sais de Vera Candida

Véronique Ovaldé, Ce que je sais de Vera Candida, 2009.
Waou ! Je n'ai qu'un mot à dire en fermant le livre : waou. Ce roman est un tourbillon, un voyage dans une Amérique Latine inventée, recrée de morceaux d'elle-même mais tellement réaliste qu'on plonge totalement dans la vie de ce petit pays sorti tout droit de l'imagination luxuriante, comme une forêt tropicale, de l'auteur. Ce que je suis heureuse de lire depuis quelques romans de jeunes écrivaines avec un tel talent qui ose tout, chamboule les codes, décoiffe les clichés et qui partent aussi loin dans la construction des personnages, l'expérimentation du style et un je ne sais quoi d'envoûtement qui nous entraîne dans leurs pas ! Je veux bien sûr parler de Véronique Ovaldé ainsi que de la suissesse Douna Loup
Ici, avec ce roman, nous sommes en plein real maravilloso latino-américain. Ma parole, c'est du Alejo Carpentier en VF et au féminin ! L'histoire est incroyablement profonde, le récit intergénérationnel de la vie de plusieurs femmes au destin commun et répétitif : noir, tragique, violent et beau à la fois. De l'amour et de la haine qui se transmet de mère en fille. Une ode à la liberté, à la force et à la fragilité des femmes. Et puis, cette sensation étrange d'être au fin fond de l'onirisme et de la poésie et d'un coup ramenés à la réalité, au présent, au concret, par un élément du décor, une référence précise, l'humour. 
Il est difficile d'aller au-delà de ce si peu de phrases pour parler de ce livre, comme on ne peut décrire ses sensations en regardant un chef-d'oeuvre, le frisson ressenti en face d'une fresque italienne, le mouvement intérieur de l'âme provoqué par des chants mongols. 
Alors, voilà : waou... 

dimanche 17 mars 2013

Le vieux qui ne voulait pas fêter son anniversaire

Jonas Jonasson, Le vieux qui ne voulait pas fêter son anniversaire, 2009.
"Les choses sont ce qu'elles sont et elles seront ce qu'elles seront."
C'est le leitmotiv de ce personnage, Allan, un centenaire qui s'échappe de sa maison de retraite le jour même où toute l'institution a décidé de lui fêter son anniversaire. Il part au hasard, prend un bus, et se retrouve on ne sait trop comment en possession d'une valise remplie de billets de banque. En cavale, donc, et poursuivi par une bande de dangereux criminels qui veulent récupérer leur pognon, il rencontre des personnages tous plus tordus les uns que les autres. Une fois le road movie lancé, l'auteur ouvre un deuxième cycle dans l'histoire, dont le récit débute à la naissance d'Allan. La cavale du centenaire s'intercale alors avec sa biographie qui n'est pas moins incroyable, totalement insérée dans la grande Histoire. A chaque moment clé des évènements mondiaux, le protagoniste joue en effet un rôle qui n'a rien d'anodin. Evidemment, ce Forest Gump suédois, un peu simplet, ne peut pas avoir eu le pouvoir d'agir sur les décisions des grands dirigeants comme Churchill ou Mao, il n'est pas crédible. Par ailleurs, je ne suis pas allée vérifier si tous les éléments historiques mentionnés au fil des chapitres étaient exacts, romancés ou purement inventés. Pour autant, on n'a pas envie de vérifier, et on est tout à fait disposés à croire Allan responsable de la bombe atomique et autres explosions pendant la Guerre d'Espagne ou celle de Corée. On adhère, le pacte fonctionne, parce que c'est tellement gros qu'on se dit qu'il fallait tout de même oser écrire des choses pareilles. Les deux road movie, l'un à travers la Suède, l'autre à travers le monde et le passé, suivent donc leur parcours en parallèle sans qu'on s'en lasse jamais. L'auteur a un don pour faire d'immenses digressions, pour trouver des recours à son récit toujours plus loufoques et insensés, tout en nous tenant en haleine, en nous menant par le bout du nez. L'ironie avec laquelle il écrit et le soin qu'il porte à faire du cynisme sur ses personnages, à raconter leur périple avec une dose non homéopathique d'humour noir, y sont sûrement pour beaucoup dans le fait que, si on le pouvait, on lirait ce roman d'un trait. Ce centenaire là, allergique à la politique et à la religion, philosophe et adepte de la pensée positive, qui se fait la malle de sa maison de retraite le jour où tout le monde l'attend, est drôlement attachant. 
Bon, le fait que j'adore les road movie, que je ne peux pas m'empêcher d'en créer dès que j'écris et que j'en suis moi-même un en chair et en os ont certainement influencé positivement mon opinion sur ce livre...

lundi 11 mars 2013

Ciels d'Auvergne

Entre deux périodes de neige, sur les plateaux au-dessus de la petite ville de Gelles qui porte bien son nom, le nez dans le vent et la chaîne des Puys en point de mire...




L'embrasure

Douna Loup, L'embrasure, 2010.
Avant de lire mon résumé, je vous copie ici la trajectoire de cette écrivaine suisse, que j'ai trouvé sur le site de Babelio (http://www.babelio.com/auteur/Douna-Loup/102688) :

Nationalité : Suisse
Né(e) : 1982
Biographie :

Douna Loup est née en Suisse, de parents marionnettistes. Elle passe son enfance et son adolescence dans la Drôme.

À dix-huit ans, son Baccalauréat Littéraire en poche, elle part pour six mois à Madagascar en tant que bénévole dans un orphelinat.

À son retour elle s'essaye à l'ethnologie, elle nettoie une banque suisse pendant trois mois, garde des enfants durant une année, écrit sa première nouvelle, puis devient mère, et étudie les plantes médicinales.

Après avoir vendu des tisanes sur les marchés et obtenu un certificat en Ethno-médecine, elle se consacre pleinement à l'écriture et à ses deux filles.

L’embrasure est son premier roman.

J'ai lu cette biographie à l'instant, après avoir terminé le roman, et je trouve que l'oeuvre colle parfaitement au profil de l'artiste. Atypique, original, déterminé, poétique. L'embrasure est une oeuvre qu'on n'a pas l'habitude de lire.
Le personnage, un jeune homme de vingt-cinq ans, employé dans une usine, passe tout son temps libre dans la forêt, sa forêt, qu'il aime arpenter, dans laquelle il aime à la fois se noyer et se retrouver. La nature nous est décrite comme une femme dont le personnage respire les parfums, frôle les courbes, ressent la chaleur et la sensualité. Mais, la forêt, c'est aussi le lieu de la chasse, de la traque de la bête, la passion du jeune homme, également subjugué par le tir, par la précision de l'arme qui tue l'animal. Jusqu'à ce jour où le protagoniste découvre, lors d'une partie de chasse, au coeur de sa forêt, le cadavre d'un homme. Dans les poches du moribond, un carnet avec des phrases de la Bible. Une obsession s'installe alors dans la tête du jeune homme. Pourquoi cet homme est-il mort dans sa forêt, à cet endroit ? Quelle était donc sa quête morbide ? Au nom de quelle étrange et fanatique ligne de conduite s'est-il laissé mourir de faim ? Mais le récit n'embraye vraiment qu'au moment où surgit un autre personnage. Il s'agit d'une femme, Eva. Etrange, elle aussi. Armée. Effrayante et mystérieuse. Elle se joint au héros dans cette enquête sur le cadavre de la forêt. En même temps, L'embrasure est le récit d'initiation de deux orphelins, un travail de deuil partagé, un apprentissage et une découverte timorée de l'Autre. Douna Loup nous captive par cette écriture crue mais pas vulgaire, directe mais pas familière, poétique mais pas empathique. Ces personnages se dessinent comme des ombres, des portraits au fusain. Une artiste à découvrir.
Douna Loup vient de publier un deuxième livre : Les lignes de ta paume.

Les étangs des Mognaises

De l'eau au moulin de ceux qui disent qu'on ne voient plus bien pourquoi le blog s'appelle encore Montagnes etc... alors que j'écris sur le Limousin et autres plats pays.
A la décharge des monts d'Ambazac, des monts de Guéret et autres monts de Blond, comme leur nom l'indique, ces régions ne sont pas de grandes plaines mais bel et bien déjà les contreforts du Massif Central. Certes, 700 à 800 mètres d'altitude, c'est peu mais, à l'usage, les mollets savent bien que certaines côtes sont assez redoutables, et c'est une montagnarde qui vous le dit.
Aujourd'hui, donc, pour alimenter les critiques, un petit tour dans la Brenne... autour des étangs des Mognaises, près du Blanc (36). Très belle balade d'1h30 - je me retiens pour ne pas écrire rando -, dans des paysages irréels sous le ciel d'orage. Le blanc du sable contraste avec les nuages bleu anthracite rayé d'éclairs. Parfois, un rai de lumière fait ressortir les plumes immaculées du héron qui s'envole. Le vent souffle dans les roseaux et diffuse le parfum des premières fleurs d'aubépine. Plus loin, un château à l'abandon achève de donner au paysage une ambiance inquiétante de conte. Le merveilleux à portée de main.






dimanche 10 mars 2013

Un soir à Bourganeuf

Cette ville est un joyau. Ces gens-là vivent dans un musée. Vous savez, comme on fixe son attention sur un bol en céramique derrière une vitrine d'exposition en plissant les yeux très fort pour se figurer qu'il y a longtemps, des hommes on bu là-dedans. Eh bien, à Bourganeuf, pas besoin de plisser les yeux. Ou bien est-ce le vent de ce soir-là qui nous projette directement dans le passé. Sur la place de l'église, à 360 degrés, on est entouré de maisons anciennes aux fenêtres ornées de linteaux tous différents, de terrasses à l'italienne, de rues pavées qui s'enfoncent au coeur de la ville. Et, partout, l'ombre des chevaliers de l'Hôpital. Ce sont eux qui ont construit, pour le fils d'un sultan ottoman en fuite, Zizim, la tour qui porte son nom. Dans cette prison dorée, le prince oriental est resté pendant des années, à la fois enfermé et protégé des complots de succession. En levant les yeux, on ressent toute cette histoire, cette anecdote au sein de la grande Histoire tourmentée de l'époque : le sang et la fureur fanatique des Croisades, les trahisons sous les dorures de l'Empire Ottoman et, au milieu de la France, une bourgade synthétisant tout cela.






vendredi 8 mars 2013

La cascade d'Augerolle

Est-ce que l'hiver s'en est allé ? Est-ce que le printemps pointe enfin le bout de son nez ? Un petit tour en Creuse pour le vérifier...
Toujours au sud de Bourganeuf, la forêt d'Augerolle abrite des mystères. Les outils du tailleur de pierres disséminés sur les roches, au creux de l'ancienne carrière. Un peu plus bas, les tourbières cachent une petite population de loutres qu'on ne voit que la nuit, autant dire, jamais. Le moulin, quant à lui, est désert. L'ancienne roue ne moud plus le chanvre. La cascade tourne dans le vide. Un petit coin de forêt qui dissimule ses mystères, transpire encore le savoir faire des anciens et respire les légendes et les elfes.





mardi 5 mars 2013

Le site des Roches

Tout près de Bourganeuf, dans la Creuse, au bout de minuscules routes entortillées, il est un endroit exceptionnel : un amas de roches de marbres, un immense ensemble minéral depuis lequel la vue est imprenable sur les monts de la Marche. Debouts sur un piédestal naturel, nous embrassons du regard le panormara à 360 degrés, les pieds ancrés dans la roche et le reste du corps attrapé par le ciel, la tête entraînée à la suite du vol d'un aigle. Comme de tous ces endroits suspendus, il est difficile de se résigner à redescendre... Heureusement, les douces collines, les verts plateaux peuplés de plus de vaches que d'hommes nous accueillent et amortissent le choc du retour au bruit et à la terre ferme.





lundi 4 mars 2013

Montrésor

Niché au coeur de la Touraine, un village hors du commun, où le temps s'est arrêté. Tout en haut et partout où l'on pose le regard, comme un repère, le château, entre Moyen Age et Renaissance, s'élève au-dessus du village, majestueux. Tout près de l'ancien pont levis, la vue est grandiose sur la petite vallée bucolique, les jardins en carré et les toits de vieilles tuiles. Tout en bas, la rivère serpente, ornée de quelques ponts de bois, et il fait bon, en été, y flâner, à l'abri de la chaleur, du bruit et de l'agitation du monde. Dans les ruelles, les maisons à colombages cohabitent avec des demeures rénovées aux volets pastels et des murs moyenâgeux. On aime se balader dans les rues minuscules qui montent et descendent comme des escaliers vers le château. On aime y entendre nos pas résonner sur les vieux pavés, le ronronnement d'un chat sur le mur, la sensation de l'eau fraiche de l'ancien lavoir sur les mains. Montrésor, joyau bien connu des touristes mais, en hiver, trésor familial qui renferme depuis toujours nos confidences, nos rires et nos embrassades.








Deux comédies

Pour une fois, j'ai réussi à regarder deux films jusqu'au bout ! Deux comédies françaises bien menées, drôles et pas niaises ni plates, ce qui est assez rare (et je suis diffcile...)
Je vous trouve très beau
D'Isabelle Mergault, avec Michel Blanc.
L'histoire d'un fermier qui perd sa femme et qui, pour remplir le vide, va chercher une compagne en Roumanie. Ce qui au début part pour ressembler comme deux gouttes d'eau à une caricature du genre L'amour est dans le pré et dont on craint qu'on va y voir s'aligner des quiproquos - le stratagème que je déteste le plus au monde, ça m'énerve un maximum !- se transforme donc en jolie histoire. Loin des clichés du bouseux inculte qui récupère une femme étrangère et tout est bien qui finit bien, ce film est extrêmement intelligent, manie les travers et les beautés de la nature humaine avec recul et tact. La juste mesure entre le rire et les larmes et jamais d'exagération. Une chronique de la vie écrite par quelqu'un de brillant.
Je reste !
Avec Sophie Marceau et Vincent Perez.
Un couple au bord de la dérive parce que monsieur, l'archétype de l'égoïste et du goujat, passe plus de temps avec ses maîtresses à Rio et surtout sur son vélo qu'à s'occuper de sa femme et de son fils. Un malade de la bicyclette, par tous les temps et tout le temps, et de Jacques Brel... jusqu'au jour où, lassée de faire la voiture suiveuse, sa femme le plante en bas d'un col et décide de demander le divorce. Le film est extrêmement drôle, les acteurs géniaux, mais le tout prend tournure lorsque, d'une part, le mari abandonné se lie d'amitié avec l'amant pour tenter de trouver une recette pour reconquérir sa femme, et d'autre part, quand on découvre que l'amant, scénariste, se sert de cette expérience pour écrire un scénario qui se déroule jour après jour, sous ses yeux. Une trouvaille, vraiment, le genre de texte dans le texte, de mélange des genres qui me plaît beaucoup beaucoup. Quant à la fin, rebondissements en série, c'est un clin d'oeil au travail d'écriture, une pirouette.
Deux très bons films, donc, que je me permets de vous conseiller !

dimanche 3 mars 2013

Sous le soleil de Toscane

Frances Mayes, Sous le soleil de Toscane, 1996.
Encore un livre sur une maison ! Encore le récit d'une adaptation réussie au soleil ! Encore et encore l'autobiographie anglo-saxonne d'une rénovation de maison méditerrannéenne. Peter Mayle au féminin ?
Oui, peut-être que c'est encore et encore le même thème, mais qu'est-ce que c'est bien...
Frances Mayes nous entraine dans sa douce folie de s'attaquer à la rénovation d'une immense vieille batisse toscane, de s'établir en résidence estivale dans un coin d'Italie dont elle ne parle pas la langue, de chercher avec plus ou moins de succès des ouvriers volontaires pour s'attaquer à des murs de pierres datant des Etrusques, à des terrasses enfouies sous une végétation anarchique. Frances Mayes et son compagnon, loin de s'asseoir sur une chaise longue pour regarder les autres travailler, mettent la main à la pâte dans la maison comme au jardin, et l'on suit leurs travaux, leurs découvertes, leurs petits soucis racontés avec tellement de vérité qu'on les fait nôtres, qu'on se sent par moments partie prenante de cette aventure toscane.
Et puis, plus que tout, il y a l'art de vivre. La nourriture, les plaisirs simples, le goût de l'ail, du basilic, de l'huile d'olive et du vin local; les senteurs des roses, le jus des fruits mûrs, le chant entêtant des cigales et le vent caniculaire dans les tilleuls et les figuiers. L'auteur nous fait partager ses enchantements culinaires, ses recettes toutes plus savoureuses les unes que les autres. Elle nous met l'eau à la bouche et le baume au coeur, de voir à quel point la vie peut être simple à l'extrême, presque poussée au dénuement, et en même temps d'une élégance, d'une richesse à faire pâlir de jalousie les créateurs du style chic. Car quoi de plus "classe'" que de croquer une figue du jardin, que de marcher pieds nus sur des dalles fraiches en pleine chaleur, ou de se faire bronzer à l'abri d'une pierre antique ?
Mais qu'attendre d'autre qu'une invitation au ravissement et qu'une adoration du jour présent de la part d'une femme qui a en elle les mystères du sud des Etats-Unis, de ces terres désertiques à la frontière mexicaine peuplées d'étrangetés, de miracles et de mirages ?