lundi 11 novembre 2013

Allex (26)

Voilà pourquoi j'ai quitté Paris. Voilà pourquoi j'ai fait un grand bond spatial : simplement, ni plus ni moins, pour me sentir à quelques quatre heures de ce sud-là, de ce p'tit coin d'paradis, comme aurait dit Brassens, mais sans les parapluies, pour le kif de palper cette terre-là. 
Ce matin, après les averses qui ont lavé le ciel hier et laissé en souvenir des couches de gris accrochées aux sommets, je me lance à la conquête - amoureuse, pas militaire - du village d'Allex. Tout est calme dans les ruelles et mes pas résonnent sur les vieilles pierres. J'ai l'appareil photo à la main et le coeur dans la poche, pour ne pas qu'il batte trop fort. Je ne veux surtout pas perturber la quiétude du lieu, cette symphonie du silence et de l'instant qui s'écoule ici, tel un fluide souterrain, le pouls au repos comme celui d'un vieux sage. Je ne cesse de monter et de faire grandir le sourire intérieur, qui va croissant proportionnellement à la beauté qui prend de l'ampleur au fur et à mesure que je grimpe. Je me retrouve tout là-haut, en plein mistral. Le regard embrasse l'horizon. L'air est limpide et transparent, les images se détachent comme dans un rêve. Je m'accoude au mur de pierres sèches et m'immobilise. 


Onze heures. Les cloches de l'église retentissent, mais ce n'est pas ce bruit ancestral que je goûte, c'est le silence qui s'ensuit, l'absence de son plus riche que n'importe quelle musique. Le rien qui résume à lui seul la perfection.

Je redescends par des ruelles, me faufile à travers des passages de plus en plus étroits et découvre des trésors. Portes colorées, oranger croulant de fruits dans une cour, terrasse avec vue sur la vallée d'une villa à l'italienne, morceaux de vies qui se cachent derrière les lourds murs, mais vies qui transpirent à travers eux et nous font des clins d'oeil discrets, pour peu que l'on sache les deviner. 





Pour rien au monde, jamais, je ne remonterai plus au nord que ce que je suis déjà trop, car c'est ici que tout prend racine, que la vérité se dévoile. C'est ici que la lumière est la plus belle et c'est de cette lumière que je me nourrirai désormais. Manger peu mais manger mieux. Et peut-être un jour venir y cueillir les fruits...

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